Des analystes politiques estiment que la rencontre inopinée qui a eu lieu ces derniers jours en Arabie saoudite, entre le roi Salmane ben Abdelaziz et le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi, couvrait des sujets sensibles au-delà du « développement des relations bilatérales » auquel a fait allusion un communiqué du bureau du président égyptien.
Selon le quotidien arabe en ligne Rai al-Youm, les discussions entre le roi d’Arabie et le président égyptien portaient notamment sur deux accords conclus entre Riyad et Le Caire. Il s’agit d’abord du soutien et de la participation de l’Égypte au grand projet économique, technologique et touristique de Neom.
L’Arabie saoudite a promis au Caire que Riyad offrirait des services exceptionnels à la partie égyptienne en échange de sa participation à ce projet.
Le président Abdel Fattah al-Sissi souhaite que ce service soit essentiellement pétrolier. Il s’agit ensuite des échanges de vues entre les dirigeants égyptien et saoudien en ce qui concerne le plan américain du « deal du siècle » avec la participation de l’Arabie saoudite, de l’Égypte, de la Jordanie et d’Israël.
Étaient présents à cette rencontre inopinée le prince héritier saoudien Mohammad ben Salmane et le chef des services du renseignement égyptien Abbas Kamel. Selon un communiqué du bureau du président Abdel Fattah al-Sissi, les discussions portaient sur les évolutions régionales et le développement des relations bilatérales entre Riyad et Le Caire.
Cette rencontre a fait du président al-Sissi le premier dirigeant arabe qui visite Neom, un projet saoudien de ville futuriste située dans le nord-ouest du royaume saoudien, près des frontières de l’Égypte, de la Jordanie et de la Palestine occupée.
D’après des sources saoudiennes, une partie de ce projet devrait être construite à l’intérieur des territoires jordanien et égyptien.
Le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane en a signé le contrat en octobre 2017 pour un budget de 500 milliards de dollars.
Le prince saoudien a l’ambition de transformer Neom en un moteur économique qui devrait, selon lui, mettre fin à la dépendance du royaume des Saoud aux revenus pétroliers.
L’analyste arabe, Mahmoud Zawawi, croit que le projet de la ville futuriste Neom poursuit deux objectifs essentiels : le prince héritier saoudien souhaite pouvoir s’en servir comme d’un élément identitaire pour transformer le royaume conservateur des Saoud en un pays moderne ou un pôle touristique à l’échelle mondiale. Neom est située non loin de la frontière de la Palestine occupée et Mohammad ben Salmane veut que son projet devienne un élément de rapprochement entre Riyad et Tel-Aviv.
Zawawi estime que l’Arabie saoudite veut donner un engagement fort à la partie israélienne : quand un projet de 500 milliards de dollars se situe tout près de la frontière de la Palestine occupée avec trois pays arabes (Arabie saoudite, Jordanie et Égypte), cela devrait signifier que ces trois pays ne voudraient jamais faire la guerre contre les Israéliens.
En outre, le projet Neom sera une introduction à l’application du « Deal du siècle ». Dans ce sens, il doit empêcher toute réaction à la violation des droits des Palestiniens par le régime israélien, et étudier la faisabilité d’un projet important aux yeux des dirigeants d’Israël : l’installation de la majeure partie de la population palestinienne au Sinaï.
Par ailleurs, Rai al-Youm cite l’analyste Abdel Hamid Qutb qui croit que la rencontre entre le président Abdel Fattah al-Sissi et le roi Salmane d’Arabie aurait porté également sur le dossier yéménite, surtout que la rencontre à Neom a eu lieu après la visite du président démissionnaire yéménite, Mansour Hadi, au Caire.
Selon Qutb, avant la rencontre de Neom, des sources saoudiennes avaient annoncé que le roi Salmane avait décidé de ne plus confier les dossiers de la Palestine et du « deal du siècle » à son fils Mohammed. Certaines sources avaient même dit que le roi Salmane préférait le plan de paix arabe de l’époque de son prédécesseur, Abdallah ben Abdelaziz, au « deal du siècle » soutenu par son fils Mohammed ben Salmane.
Côté égyptien, le président Abdel Fattah al-Sissi, voulait surtout s’assurer de la poursuite du soutien pétrolier de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis au Caire, estime Abdel Hamid Qutb.
Source: PressTV