« En s’appuyant sur le soutien des Etats-Unis et sur un chantage implicite relatif aux contrats d’armements, le royaume saoudien cherche à s’assurer que ses alliés européens continuent à lui livrer des armes. »
Il est question du chantage qu’exerce l’Arabie saoudite sur les pays occidentaux qui seraient susceptibles de dénoncer les bombardements et la famine en cours qui touchent les civils yéménites, les enfants souffrant particulièrement de cette guerre dégueulasse. Car les Saoudiens, battus au sol, sont les maîtres des airs. Et même au sol, ils n’engagent plus leur armée minable mais des mercenaires venus d’Afrique, ce qui fait que les forces yéménites (armée + Ansarullah) tuent des Soudanais, en gros.
Pour rappel, le 9 août 2018, une bombe à guidage laser de fabrication américaine a pulvérise un bus rempli d’enfants près de Saada. Bilan : 51 morts et 79 blessés.
Réprobation internationale: l’ONU, les USA et la France réclament une enquête. « L’Espagne annonce le réexamen de ses projets de ventes d’armes à Riyad. » Mais les Saoudiens réagissent en menaçant l’Espagne de renoncer à l’achat de 5 corvettes, et l’Espagne cède. Idem avec Berlin. Le Canada en 2017 avait aussi subi le chantage saoudien par la menace de gel des investissements sur place.
Le Monde précise qu’en trois ans et demi de guerre, les Saoudiens ont effectué 18 000 sorties aériennes pour bombarder, le plus souvent, des cibles civiles. C’est une guerre de terreur, et les guerres de terreur n’ont jamais été gagnées: la population est au contraire plus que jamais déterminé contre les agresseurs.
Selon l’aveu d’un officiel occidental : « Des doutes s’expriment chez tous les principaux alliés [de Riyad], ils reconnaissent que cette guerre ne peut pas être gagnée. Et pourtant, ils continuent de donner la priorité aux ventes d’armes. »
Pressions sur le conseil des droits de l’Homme
Parallèlement, la mission des experts chargés d’enquêter sur de possibles crimes de guerre au Yémen a été prolongée d’un an, malgré l’opposition de l’Arabie saoudite et des Emirats arabes unis.
Le Conseil des droits de l’homme des Nations unies a finalement prolongé d’un an, vendredi 28 septembre à Genève, le mandat d’un groupe d’experts qui enquêtent sur de possibles crimes de guerre au Yémen. Présentée par les Pays-Bas et soutenue par l’Union européenne, cette résolution a été adoptée par 21 voix sur 47, avec 18 abstentions.
La coalition saoudo-US qui mène depuis mars 2015 une guerre sans merci contre le Yémen.
Menaces de représailles économiques
L’an dernier, Riyad avait menacé de représailles économiques les pays qui soutiendraient la création d’une commission d’enquête internationale. Un simple groupe d’experts avait finalement été formé, qui ne rapporte pas lui-même ses conclusions au Conseil de sécurité. Leur premier rapport, rendu public en août, a causé un « choc » à Riyad, notait un diplomate occidental.
Ce rapport accusait la coalition de possibles crimes de guerre. Il dénonçait des cas de torture dans des centres de détention contrôlés par les Emirats arabes unis, ainsi que l’enrôlement d’enfants-soldats par leurs alliés yéménites.
Hodeïda est « l’épicentre de la flambée de choléra »
Côté sanitaire la situation s’empire de plus en plus. Les cas suspects de choléra dans les centres de soins soutenus par Save the Children ont presque triplé depuis l’escalade des combats dans la province de Hodeïda (ouest du Yémen), a indiqué mardi l’organisation britannique.
Les installations médicales appuyées par l’ONG ont connu une augmentation de 170% des cas suspects (1.342 en août, contre 497 en juin), précise l’ONG dans un communiqué, liant cette hausse à l’intensification de l’offensive menée par la coalition saoudo-émiratie contre Hodeïda.
La province de Hodeida est devenue « l’épicentre » de la maladie au Yémen, estime Save the Children.
Environ 30% des cas suspects sont des enfants de moins de cinq ans, précise l’ONG, s’inquiétant du sort de 100.000 enfants souffrant de malnutrition sévère et présentant plus de risques de contracter et mourir de maladies diarrhéiques comme le choléra, que les enfants mangeant à leur faim.
L’augmentation des cas dans la province de Hodeïda confirme une tendance générale à travers le pays, souligne l’ONG, qui indique que plus de 23.000 cas suspects ont été enregistrés depuis début 2018.
Lundi, le bureau des affaires humanitaires de l’ONU a indiqué que 2.451 personnes étaient mortes du choléra et que 1,2 million de cas suspects avaient été recensés entre avril 2017 et septembre 2018.
Les Nations unies avaient averti fin août qu’une troisième vague de choléra menaçait le Yémen après celles de 2016 et de 2017.
Du fait de l’intensification des combats, Save the Children s’inquiète aussi des dégâts sur des installations sanitaires et d’approvisionnement en eau, et de leurs conséquences sur la santé de la population.
La guerre saoudo-US contre le Yémen a fait quelque 10.000 morts, en majorité des civils, et plus de 56.000 blessés, selon l’OMS, mais le bilan réel des victimes est certainement très supérieur, selon des responsables humanitaires.
Trois Yéménites sur quatre ont besoin d’aide et des régions entières sont menacées par la famine, selon l’ONU.
Avec AFP + Le Monde