La France, soucieuse de préserver ses relations avec l’Arabie saoudite, se montre d’une extrême prudence dans l’affaire Jamal Khashoggi, jugeant prématuré de tirer des conclusions et tardant à annoncer des sanctions.
L’enquête sur le meurtre de l’éditorialiste saoudien, critique du royaume, tourne depuis le début autour d’une question brûlante : dans quelle mesure le puissant prince héritier Mohammed ben Salmane (dit « MBS ») est-il impliqué ?
Pour l’instant, la France se borne à dire que « toute la vérité » doit être établie sur « les circonstances et les responsables » et qu’aujourd’hui « le compte n’y est pas ».
Contrairement aux Etats-Unis et à l’Allemagne, elle n’a encore pris aucune sanction contre la vingtaine de suspects soupçonnés d’être impliqués dans le meurtre.
Le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a certes promis lundi des sanctions « très rapidement » mais aussi souligné que la France devait encore « se faire une opinion ».
« La position, c’est de dire +attendons les résultats de l’enquête+. Or manifestement l’enquête va être diligentée par les Saoudiens eux-mêmes. Il est clair qu’elle n’impliquera pas MBS », considère Denis Bauchard, un ancien diplomate spécialiste du Moyen-Orient à l’Institut français des relations internationales (Ifri).
A l’instar de Donald Trump, le dirigeant français a rappelé l’importance de l’alliance avec l’Arabie saoudite pour la France et les autres pays occidentaux, qu’il s’agisse d’équilibre régional face à l’Iran, de coopération militaire ou de fourniture de pétrole.
Copenhague suspend les ventes d’armes à l’Arabie
Cependant, le Danemark a emboîté le pas à l’Allemagne en annonçant jeudi la suspension des ventes d’armes à l’Arabie saoudite à la suite à l’assassinat de Khashoggi.
« Le ministère des Affaires étrangères suspend les exportations d’armes et de matériel militaire à destination de l’Arabie saoudite », a annoncé le chef de la diplomatie danoise, Anders Samuelsen.
« J’espère que la décision danoise pourra créer un élan supplémentaire », a-t-il ajouté.
Le Danemark n’a pas prévu d’autres sanctions, a indiqué à l’AFP un porte-parole du ministère.
Pour le pays nordique, qui a déjà une politique restrictive, l’Arabie saoudite ne représente pas un gros marché. Seulement dix exportations de matériel militaire, pour un montant non communiqué, ont été approuvées en 2017.
Lundi, l’Allemagne a décidé d’interdire l’accès à l’espace européen Schengen, à 18 citoyens saoudiens soupçonnés d’être impliqués dans le meurtre du journaliste Jamal Khashoggi.
Khashoggi a été assassiné le 2 octobre par des agents saoudiens au consulat de son pays à Istanbul.
Ce critique du pouvoir saoudien et collaborateur du Washington Post, a été « drogué » et son corps « démembré », selon l’aveu de Ryad, qui avait en premier lieu nié toute responsabilité dans cette affaire.