Les gouvernements occidentaux et leurs chancelleries restent silencieux depuis la probable attaque chimique à Alep en Syrie ce 24 novembre. Quelle en est la raison? Damas et ses alliés ont accusé les terroristes de la région d’Idlib et cette fois-ci leurs ennemis ne semblent pas en mesure de faire porter le chapeau au «régime». Analyse.
Au lendemain de très vraisemblables frappes chimiques qui ont touché des quartiers d’Alep, la porte-parole de la diplomatie russe Maria Zakharova a appelé la communauté internationale à condamner cette attaque. Mais, pour le moment, Washington, Paris, Londres ou encore Berlin font la sourde oreille: pas de déclarations officielles, pas de tweets rageurs, aucune condamnation étatique et aucun appel de compassion pour les victimes. Pourquoi?
Contrairement aux épisodes précédents, les Casques blancs ou l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH) n’ont pu propager de rumeurs qui incriminent le gouvernement de Bachar el-Assad d’utiliser des armes chimiques.
Si pour le moment aucune enquête reconnue par la communauté internationale ne confirme que les obus qui se sont abattus sur Alep ce samedi 24 novembre ne contenaient du chlore, et donc, ne désigne telle ou telle partie comme responsable, Damas a immédiatement réagi en accusant les terroristes d’Idlib. Vidéo à l’appui, le gouvernement d’el-Assad a dénoncé que des obus contenant une substance chimique avaient atterri sur des quartiers résidentiels (Khalidiya, Nile Street and Al Zahra) de la ville d’Alep, contrôlée en grande partie par l’armée syrienne.
Depuis de nombreux groupes rebelles et terroristes récusent ces accusations, évoquant même un nouveau mensonge du pouvoir de Damas, tandis que d’autres comme Hayat Tahrir al-Sham (ex-front al-Nosra) se taisent.
Si le doute est donc encore permis, il devrait seulement porter sur l’identité du groupe terroriste responsable — il y a plus de 10 factions distinctes — et non sur une possible responsabilité de Damas, des forces iraniennes ou russes. Mais en revanche, la culpabilité de tel ou tel groupe pourrait avoir des conséquences sur son parrain et donc possiblement sur la Turquie qui s’est engagée à contenir les agissements des factions rebelles et terroristes d’Idlib. C’est d’ailleurs peut-être l’objectif recherché de ces frappes: faire capoter le pacte scellé à Sotchi entre Poutine et Erdogan qui, pour le moment, éloigne toutes actions occidentales dans la région.
Interrogé sur cet événement, Emmanuel Macron a répondu de manière lapidaire que la France ne disposait pas d’«informations claires et suffisantes pour faire un commentaire». Le Président est prudent et à bon escient. Mais il est à noter que cette sobriété tranche largement avec sa précédente gestion de cas d’utilisation supposée d’armes chimiques en Syrie, comme celle d’avril dernier, où avant même le début d’une enquête internationale, la France avait bombardé des sites gouvernementaux avec ses alliés américains et britanniques. Des frappes, qui pour rappel, étaient contraires aux conventions et au droit international.
À l’époque, le responsable désigné était Damas. Là, il s’agit simplement — pourrait-on dire — de groupes terroristes. Et si, pour la France, les combats dans le nord-ouest, dans la région d’Idlib, ces terroristes pourraient bien aider la stratégie occidentale en empêchant la reconquête de Bachar el-Assad et de ses alliés russes et iraniens.
La seconde raison de ce silence occidental assourdissant est que la Russie a empêché la France et ses alliés de réagir avec empressement. Convaincu de l’identité du coupable, Moscou a riposté à cette attaque chimique en bombardant la position d’où seraient partis ces obus, ce dimanche 25 novembre. Avec force donc, la Russie a coupé l’herbe sous le pied des Occidentaux. Invitée à la demande de Damas depuis 2015 pour l’épauler face aux terroristes, la Russie n’entend plus se faire dicter ses actions politiques et militaires, surtout dans une région où les Occidentaux en sont absents.
Il sera donc intéressant d’attendre les résultats de la future enquête menée par l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) — dont la mise en place a été demandée par Damas et Moscou — et d’analyser les réactions des chancelleries occidentales face à cette attaque terroriste qui a fait entre 50 et 110 blessés civils.
Source: Avec Sputnik