L’année 2019 marque un tournant pour le secteur du pétrole et du gaz libanais mais aussi pour le Liban tout court. En effet, fin novembre 2018, à Londres, le ministre de l’Énergie libanais a fait la promotion du lancement, prévu début 2019, du deuxième round d’attribution de licences d’exploration et de production d’hydrocarbures offshore. Le lancement de cet appel d’offres fait suite à la signature le 9 février 2018 de deux accords d’exploration et de production des blocs 4 et 9 par le consortium formé par Total, Eni, Novatek et le gouvernement libanais. Après la découverte en 2009 et 2010 par Noble Energy de gisements de pétrole et du gaz dans le bassin du Levant, la Méditerranée orientale est désormais un pôle énergétique.
D’après les données géologiques et sismiques, le Liban serait ainsi une région à très haut potentiel. Voilà des choses qui ne plaisent pas du tout à Israël et aux États-Unis qui comptent et recomptent les réserves gazières et pétrolières libanaises, estimés respectivement à 25 000 milliards de pieds cubes et à 800 millions de barils.
Mais ce qui inquiète surtout l’axe Israël-USA, c’est le fait que le Liban est désormais capable grâce à l’arsenal de la Résistance de défendre ses ressources énergétiques et de contrer toute violation ennemie. C’est à l’appui de cette capacité de défense retrouvée que le président Aoun, le président du Parlement ont évoqué cette semaine, la détermination de Beyrouth à faire aboutir son droit à exploiter ses richesses énergétiques, loin de toute ingérence. Mais il y a plus: les États-Unis qui viennent d’offrir sa « médiation » au Liban dans le dossier du tracé des frontières terrestres et maritimes sont inquiets de voir la Russie se mêler au secteur énergétique du Liban. Surtout que la Méditerranée orientale est déjà en partie sous contrôle militaire de la Russie à la faveur de la guerre en Syrie et à la présence militaire russe dans ce pays. S’il est vrai que les réserves gazo-pétrolières de cette région ne sont pas énorme, mais sa situation géostratégique en fait une voie de transit de choix pour toute partie qui aimerait influer sur le juteux marché de gaz européen. Les Américains ont déjà tenté de faire rapprocher Israël des pays arabes du golfe Persique et faire de cet ensemble un contre-poids gazier contre la Russie. Washington lise aussi sur Israël et Chypre pour concurrencer le monopole européen du gaz russe. Mais la percée russe au Moyen-Orient semble avoir compromis l’ensemble de ses projets.
Le 9 février 2018, deux accords d’exploration et de production ont été signés par le consortium formé par Total, Eni, Novatek (Total, l’opérateur détient 40% de l’entité, Eni 40% et Novatek 20%) et le gouvernement libanais. Pour faciliter l’exploration de ces ressources, les eaux territoriales libanaises ont été divisées en 10 blocs d’après la nature géologique du terrain. Ces accords concernent les blocs 4 (1911 km²) et 9 (1742 km²)[ix]. L’objectif est de forer au moins un puits par bloc dans les trois premières années et de débuter en priorité par le bloc 4 d’ici 2019. En faisant partie du consortium, Novatek, une des plus grandes compagnies gazières russes indépendantes, fait son entrée « énergétique » dans l’espace méditerranéen. Une première pour l’entreprise qui déploie la majorité de son activité en Russie. Tout ceci ne peut être toléré par l’axe US-Israël.
Pour la deuxième fois en l’espace de 48 heures, une frégate israélienne a violé les eaux territoriales libanaises près des côtes de Ras al-Naqoura dans le sud du Liban.
Un navire israélien a tiré, dans la nuit du vendredi à samedi, sur un bateau de pêche libanais en enfreignant l’espace maritime libanais dans la région de Ras al-Naqoura, est-il écrit dans le communiqué des forces armées libanaises qui dénonce une nouvelle violation dans la nuit de dimanche à lundi.
Certes ces attaques n’ont pas laissé de dégâts, n’empêche qu’elles marquent la préoccupation extrême de la partie israélienne de voir le Liban désormais apte à disposer de sa souveraineté maritime, territoriale et se prémunir des cartes capables de changer littéralement la donne.
« Un Liban énergétiquement indépendant et qui a de tout temps subi les contre-coups des politiques américaines est ce qu’il y a de pire pour Israël. Le maintien et la préservation des richesses gazières sont désormais une mission qui revient de droit aux forces armées libanaises dont le Hezbollah. À cette aune, personne ne peut parler ou faire avancer désormais la cause du désarmement du Hezbollah. D’ailleurs on entend de plus en plus l’armée libanaise se faire prévaloir de son droit de protéger les intérêts suprêmes du Liban. Ce n’est pas à l’appui du soutien saoudien ou américain que l’armée libanaise évoque une telle perspective. Il y a le Hezbollah et peut être à l’avenir la Russie qui entre en ligne de compte », note un analyste à Téhéran.
Source: PressTV