Un diplomate américain en poste en Ukraine a livré, le mardi 22 octobre, devant le Congrès un témoignage accablant accréditant l’idée que Donald Trump a utilisé la politique étrangère américaine à des fins politiques personnelles.
Les élus démocrates de la Chambre des représentants ont vu dans le récit de Bill Taylor, chargé d’affaires américain à Kiev, la preuve que les soupçons les ayant poussé à lancer une procédure en vue de la destitution du 45e président des Etats-Unis étaient fondés.
Lors d’une déclaration à huis-clos, dont le contenu a rapidement fuité, ce diplomate de carrière a relaté comment le président de la première puissance mondiale avait essayé de faire pression sur l’Ukraine pour que ce pays enquête sur la famille de son rival démocrate Joe Biden à l’approche de l’élection de 2020. Et avait conditionné l’octroi d’une aide de Washington à Kiev à l’aboutissement de sa demande.
Le président américain avait-il senti venir cette déposition à haut-risque?
Quelques heures avant qu’elle ne démarre, il avait allumé un contre-feu et provoqué une vive polémique en comparant la procédure le visant à un
« lynchage », mot lourd de sens aux Etats-Unis, où il est associé aux meurtres de Noirs par des Blancs aux XIXe et XXe siècles, essentiellement dans le Sud.
Devant la Chambre des représentants, M. Taylor, a relaté que Gordon Sondland, ambassadeur américain auprès de l’Union européenne (UE), lui avait clairement indiqué que M. Trump avait lié le déblocage d’une aide à l’Ukraine à l’annonce par Kiev d’une enquête visant le fils de M. Biden, qui fut au conseil d’administration d’une entreprise ukrainienne.
Sondland « m’a dit (..) que tout était lié à une telle annonce, y compris l’aide », a-t-il raconté dans une longue déclaration de 15 pages qui a été publiée dans son intégralité par le Washington Post.
« L’ambassadeur Sondland a dit qu’il avait parlé au président ukrainien Volodymyr Zelensky (…) et lui avait dit que +même si ce n’est pas une contrepartie+, s’il +n’éclaircissait pas les choses+ en public, nous serions dans une impasse », a-t-il raconté devant les élus.
« J’ai compris +impasse+ comme voulant dire que l’Ukraine ne recevrait pas l’assistance militaire dont elle avait cruellement besoin », a-t-il ajouté.
La diplomate a aussi souligné comment M. Sondland avait essayé de lui expliquer la logique « d’homme d’affaires » de Donald Trump. « Lorsqu’un homme d’affaires est sur le point de signer un chèque à quelqu’un qui lui doit quelque chose, l’homme d’affaires demande à cette personne de payer avant qu’il ne signe le chèque ».
« Tout y est »
Nombre d’élus démocrates ayant assisté à l’audition ont insisté sur la force de cette déposition.
« Ce que j’ai entendu aujourd’hui de la part de Bill Taylor était très troublant et explosif », a tweeté Adriano Espaillat.
« C’était tout simplement le témoignage le plus accablant que j’ai entendu », a surenchéri l’élue Debbie Wasserman Schultz.
« Tout y est », a ajouté Tom Malinowski. « Je ne sais pas quoi ajouter face à une déclaration aussi claire et détaillée ».
Dans un message daté de début septembre adressé à M. Sondland, M. Taylor s’inquiétait ouvertement des pressions exercées par la Maison Blanche sur la présidence ukrainienne.
Je « trouve ça dingue de suspendre l’aide sécuritaire en échange d’un coup de main pour une campagne politique », écrivait-il.
Donald Trump n’a pas réagi directement à ce témoignage mais sa porte-parole, Stephanie Grisham, a dénoncé une « campagne de calomnies » menée « par des élus d’extrême-gauche et des bureaucrates radicaux non-élus qui sont en guerre contre la Constitution ».
Source: Avec AFP