Une loi adoptée par la Douma instaure une nouvelle classification des «agents de l’étranger». Désormais, en Russie, un individu rédigeant des articles politiques et touchant des financements étrangers pourra être considérée comme tel.
La Douma d’État russe a adopté en troisième et dernière lecture une loi, permettant de désigner comme «agents de l’étranger» des citoyens et des organisations qui collaborent avec des médias eux-mêmes classés «agents de l’étranger».
Conformément au texte de la loi, des personnes physiques peuvent être désignées comme des «agents de l’étranger», si celles-ci produisent du contenu pour les médias ayant déjà ce statut, ou si elles reçoivent de l’argent et du matériel étranger en exerçant leur métier.
Quel est le mécanisme prévu par la loi ? Le ministère russe de la Justice, en accord avec le ministère russe des Affaires étrangères, va attribuer ce statut aux personnes physiques.
Le ministère devra prouver qu’un lien existe entre le financement étranger touché par une personne physique et la diffusion de publications par des médias considérés comme «agents de l’étranger».
Une loi critiquée en Europe
Lorsque cette loi en était à son stade de projet, elle avait reçu un accueil mitigé en Europe. La commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, Dunja Mijatovic, avait appelé le Parlement russe à ne pas l’adopter la loi.
«J’appelle la Douma d’État de l’Assemblée fédérale de la Fédération de Russie à s’abstenir d’adopter le projet de loi à l’examen qui élargirait considérablement la définition et la portée du terme « agents de l’étranger »», avait-elle ainsi écrit dans un texte publié par l’agence russe RIA Novosti.
Une réponse symétrique aux décisions de Washington
Fin novembre 2017, Vladimir Poutine a signé une loi sur le statut d’«agent de l’étranger», l’étendant aux médias. Les médias dont les financements viennent des gouvernements ou d’organisations étrangères pouvaient alors être désignées comme «agents de l’étranger».
Actuellement, le registre du ministère russe de la Justice inclut dix médias, dont Voice of America, la chaîne Current Time, et Radio Free Europe.
L’adoption de cette loi par la Russie avait pour objectif de répondre aux restrictions imposées à des médias russes aux Etats-Unis.
Ainsi la branche américaine du groupe RT avait été classé «agent de l’étranger» par la loi dite FARA («Foreign agents registration act»).
Le 9 novembre 2017, Washington avait annoncé que la société responsable de la diffusion de la chaîne RT aux Etats-Unis devrait s’enregistrer comme «agent étranger» auprès de l’administration américaine.
Le département de la Justice avait exigé que l’enregistrement soit fait avant le 13 novembre 2017: dans le cas contraire, ses dirigeants pouvaient être arrêtés et ses comptes bancaires gelés. Cette procédure entrait dans le cadre de la «Loi pour d’enregistrement d’agents étrangers», votée en 1938 aux Etats-Unis avec pour objectif de contrer l’influence de l’Allemagne nazie.
A l’heure actuelle, environ 400 structures sont enregistrées auprès de l’administration américaine comme «agents de l’étranger» mais aucun média ne figure parmi eux.
Le vice-président de la Douma, la chambre basse du Parlement russe, Piotr Tolstoï, avait alors annoncé le 13 novembre 2017 qu’une loi de représailles préparée par les députés russes devrait être adoptée dans la foulée.
Source: RT