Des Français et des Britanniques rapatriés de Wuhan sont arrivés vendredi dans leurs pays, au moment où plusieurs pays d’Asie commencent à fermer leurs frontières aux voyageurs en provenance de Chine, où le bilan de l’épidémie de coronavirus s’est alourdi à 213 morts.
Le Vietnam a annoncé suspendre la délivrance de visas tourisme à tous les Chinois et aux étrangers ayant séjourné en Chine durant les deux dernières semaines. Singapour et la Mongolie ont suspendu l’entrée de l’ensemble des voyageurs en provenance du territoire chinois.
La Chine a fait état vendredi de 43 nouveaux décès en 24 heures, le bilan s’élevant désormais à 213 morts. Le nombre de patients contaminés approche 10.000 en Chine continentale (hors Hong Kong et Macao), dépassant celui atteint lors de l’épidémie de Sras (Syndrome respiratoire aigu sévère) en 2002-2003.
Dans un contexte de forte inquiétude à l’étranger, un avion transportant quelque 200 Français de Wuhan (centre), épicentre de l’épidémie, a atterri à la mi-journée à Istres (sud de la France). Ils seront mis à l’isolement durant 14 jours dans un centre de vacances à Carry-le-Rouet, près de Marseille. L’un des rapatriés présente des « symptômes » du Coronavirus, ont annoncé les autorités.
Un avion transportant 83 Britanniques et 27 autres étrangers, affrété en coopération avec les autorités espagnoles, a par ailleurs atterri sur la base aérienne de Brize Norton, à environ 120 kilomètres à l’ouest de Londres, alors que deux cas d’infection au virus ont été confirmés vendredi au Royaume-Uni.
De son côté, Washington, qui a déjà évacué ses premiers ressortissants, a monté jeudi soir son niveau d’alerte au cran maximal en recommandant « de ne pas se rendre » en Chine.
Le Japon a émis vendredi une recommandation similaire.
Et la Russie, où ont été annoncés vendredi les deux premiers cas de coronavirus, s’apprête aussi à évacuer ses ressortissants de Wuhan et de l’île chinoise de Hainan, prisée des touristes et où se trouvent 2.665 Russes en tours organisés.
‘Inefficaces’
L’Organisation mondiale de la santé (OMS), critiquée précédemment pour ses atermoiements, a déclaré jeudi que l’épidémie était « une urgence de santé publique de portée internationale ».
Si l’immense majorité des cas de contamination restent localisés en Chine, au premier chef dans la province du Hubei (centre) et sa capitale Wuhan, une centaine ont également été déclarés dans près de 20 autres pays, y compris en Europe.
Outre l’Asie, les mesures de précaution internationales s’intensifient également ailleurs dans le monde.
L’Italie et Israël ont annoncé suspendre tous les vols en provenance de Chine, tandis que plus d’une quinzaine de compagnies aériennes, dont Air France, British Airways et Lufthansa, ont déjà interrompu leurs vols vers le pays.
L’OMS a cependant averti jeudi que les restrictions à la circulation des personnes et des biens pendant une urgence de santé publique pourraient s’avérer « inefficaces », perturber la distribution de l’aide et plomber l’économie des pays touchés.
En Chine même, Wuhan, ville où est apparu en décembre le nouveau coronavirus, reste coupée du monde depuis le 23 février, tout comme la province environnante du Hubei: un cordon sanitaire interdit à quelque 56 millions d’habitants d’en sortir.
A la suite des Etats-Unis, du Japon et de la Corée du sud, plusieurs pays continuent d’organiser l’évacuation d’une partie de leurs ressortissants piégés à Wuhan.
Evacuations en série
Après le premier avion arrivé vendredi en France, un second vol est prévu plus tard cette semaine afin d’évacuer des Français supplémentaires, ainsi que des ressortissants d’autres pays européens.
L’Inde a elle aussi envoyé un avion pour récupérer quelque 300 de ses ressortissants.
Trois personnes évacuées en avion par le Japon ont été testées positives à leur arrivée sur le sol japonais. Deux d’entre elles ne présentaient aucun symptôme, ce qui illustre la difficulté de détecter le nouveau coronavirus.
La Corée du Sud a annoncé que 18 des 350 ressortissants rapatriés de Wuhan ont été hospitalisés après avoir montré des symptômes suspects.
D’autres pays — Italie, Allemagne, Canada ou encore Bangladesh — planifient également leurs propres opérations.
A Wuhan, qui garde des allures de ville fantôme, la circulation des véhicules non essentiels est interdite, les hôpitaux restent débordés et des milliers d’étrangers demeurent sans certitude de pouvoir partir.
« Notre plus grande préoccupation est la possibilité que le virus se propage dans des pays dont les systèmes de santé sont plus faibles », s’est alarmé jeudi le directeur de l’OMS Tedros Adhanom Ghebreyesus.
De nombreux pays ne sont pas prêts à faire face à l’épidémie, avertit également le Conseil de supervision de la préparation globale (GPMB), organe de contrôle international basé à Genève.
Barrages sauvages
D’autant que des transmissions interhumaines se multiplient hors de Chine, en Allemagne, au Japon, aux Etats-Unis ou en France.
Aux Etats-Unis, le mari d’une sexagénaire ayant contracté le virus en Chine a été contaminé à son tour, portant le nombre de cas à six au total.
En France, un sixième cas d’infection a été annoncé: un médecin contaminé par une personne rentrée en Chine.
En Italie, aucun cas n’a été finalement détecté parmi les 7.000 passagers d’un navire de croisière confinés à bord jeudi. Mais le pays a ensuite déclaré deux cas, ceux de deux touristes chinois, et proclamé l’état d’urgence.
A travers la Chine, où les congés du Nouvel an lunaire sont prolongés jusqu’au 2 février, les habitants effrayés désertent commerces et restaurants, tandis que des villages se barricadent derrière des barrages sauvages.
Les personnes originaires de Wuhan se heurtent partout à la suspicion, tandis qu’à l’étranger, les communautés chinoises font part d’une recrudescence d’attitudes discriminatoires à leur encontre.
L’impact de l’épidémie sur l’économie mondiale dépendra notamment de sa durée, a par ailleurs averti le Fonds monétaire international, alors que beaucoup d’entreprises et usines chinoises resteront fermées jusqu’au 9 février au moins.
Source: AFP