Des Etats-Unis au Royaume-Uni en passant par la Russie, des pays qui se pensaient jusque-là épargnés ont décidé samedi d’employer les grands moyens face à la propagation inexorable de la pandémie qui s’accélérait en particulier en Espagne.
Commerces fermés, places et rues désertes: d’habitude grouillante de vie, Madrid est devenue samedi, comme Milan ou Rome, une cité fantôme pour tenter de limiter la propagation à vitesse grand V du nouveau coronavirus.
Deuxième pays le plus touché d’Europe avec 5.753 cas dont plus de 1.500 depuis vendredi soir, l’Espagne s’apprête à dévoiler des mesures drastiques pour tenter de limiter la propagation du virus, qui a fait déjà 183 morts.
Le Premier ministre socialiste Pedro Sanchez, dont l’allocution était prévue initialement à 13H00 GMT, s’exprimera « dans l’après-midi » à l’issue d’un conseil des ministres extraordinaire convoqué pour décréter l’état d’alerte.
Vendredi, l’état d’urgence a été déclaré aux Etats-Unis, où l’on dénombre officiellement 2.000 cas et 47 morts. Cette décision exceptionnelle, traditionnellement utilisée pour les catastrophes naturelles, a provoqué un spectaculaire rebond à Wall Street au lendemain de sa pire séance depuis le krach boursier d’octobre 1987 et à l’issue d’une semaine noire pour les Bourses mondiales.
Apple tire le rideau
Samedi, la Chambre des représentants a approuvé un plan de bataille contre l’épidémie, qui a eu raison des divisions entre républicains et démocrates en pleine campagne présidentielle.
Dépistage gratuit, accès facilité à l’assurance chômage et déblocage de fonds fédéraux pour couvrir les frais de santé des Américains les plus modestes: le berceau du libéralisme semblait redécouvrir les vertus de l’Etat-providence, dans un pays dépourvue de système de couverture universelle pour la santé et où les congés maladie ne sont accessibles qu’à une minorité.
Comme un symbole, le géant américain Apple a annoncé samedi la fermeture de tous ses magasins jusqu’au 27 mars à l’exception de la Chine, où il vient juste de rouvrir ses boutiques.
Point de départ de l’épidémie, la Chine (3.189 morts) semble l’avoir désormais surmontée, faisant état samedi de seulement onze nouvelles contaminations et treize décès supplémentaires en une journée.
Mais la pandémie, qui a déjà contaminé plus de 143.400 personnes dans 135 pays et en a tué 5.402, progresse quasiment partout ailleurs: un premier cas a été diagnostiqué au Rwanda, un autre en Guinée équatoriale, et les pays scandinaves recensent trois décès.
La reine Elisabeth donne l’exemple
Les pays les plus touchés après la Chine sont l’Italie avec 1.266 morts, l’Iran (611 morts), l’Espagne (136 morts) et la France (79 morts).
Face à cette propagation implacable, la Russie (45 cas, aucun décès) a décidé de fermer dimanche ses frontières terrestres avec la Norvège et la Pologne aux étrangers. Le Danemark a fait de même samedi à 11h00 GMT.
Critiqué pour sa lenteur à réagir, dans un pays qui ne comptabilise officiellement que 798 cas dont 10 mortels, le gouvernement britannique de Boris Johnson s’apprête à interdire les rassemblements de masse. Le tournoi de tennis de Wimbledon pourrait en faire les frais.
La reine Elisabeth II a donné l’exemple en annulant « par précaution » plusieurs engagements prévus la semaine prochaine, selon le palais de Buckingham.
Même le Maroc, qui ne recense que huit cas, a fermé ses frontières et pris des mesures sévères de confinement (fermeture des écoles, des universités, des cinémas, des salles de spectacle et de sports, etc…).
L’Europe, nouvel « épicentre »
En Europe, « épicentre » de la maladie selon l’OMS, les systèmes de santé sont mis à rude épreuve.
Une infirmière à bout de forces endormie sur son clavier d’ordinateur: cette photo partagée sur les réseaux sociaux est devenue le symbole de l’épuisement du personnel soignant dans le nord de l’Italie, pays qui a enregistré 250 décès en 24 heures.
La France, où 800 nouvelles contaminations et 18 décès ont été comptabilisés en 24 heures, s’apprêtait à se rendre aux urnes dimanche. Dans les bureaux de vote, on se prépare à accueillir les électeurs en nettoyant poignées de porte, tables, isoloirs avant le vote. Des mesures sont prises pour éviter les files d’attente et faire respecter les distances de sécurité.
Une secrétaire d’Etat, Brune Poirson, a été annoncée positive au coronavirus samedi, ainsi qu’une sénatrice. Le ministre de la Culture et dix députés l’avaient été précédemment.
Première destination de sports d’hiver en Europe, l’Autriche, où 602 cas ont été confirmés samedi, a annoncé la fermeture anticipée de la quasi-totalité de ses stations de ski.
C’est aussi le cas en Suisse, où 1.355 personnes ont été infectées et 11 sont mortes. Mais pas en France, où les domaines skiables encore enneigés continuaient à accueillir des amateurs.
L’ONU a annoncé samedi un premier cas de nouveau coronavirus parmi le personnel de son siège à Genève.
Couvre-feu et civisme
Fermeture des magasins, restaurants et pubs en République tchèque, des théâtres, salles de concerts et stades à Rio de Janeiro (Brésil), des parcs et jardins publics à Rome: partout les villes se calfeutrent.
Parfois, à l’initiative des commerçants: sur les devantures des cafés et restaurants à Madrid, des affichettes annoncent: « fermé par responsabilité sociale ». Et la Conférence des évêques espagnols a incité les catholiques à suivre la messe « à la radio et à la télévision ».
Les 12 millions d’habitants de Manille, la capitale des Philippines (11 cas, 8 morts) seront soumis dès dimanche à un couvre-feu entre 20H00 et 5H00 du matin.
Hauts-lieux du tourisme mondial, le Musée du Louvre à Paris, la Tour Eiffel et le Château de Versailles sont fermés, tout comme les musées et sites archéologiques grecs. L’antenne du Louvre à Abu Dhabi va aussi fermer ses portes.
Le parc floral du Keukenhof aux Pays-Bas, le plus grand jardin à bulbes au monde et l’une des principales attractions touristiques du pays, a décidé de reporter sine die son ouverture annuelle.
Ligue des champions, championnats d’Angleterre, d’Allemagne et de France de football, Tour d’Italie cycliste, Formule 1, NBA: le calendrier sportif mondial continue de se réduire comme peau de chagrin en raison de la pandémie, les rares événements maintenus étant pour la plupart organisés à huis clos.
Source: AFP