Démissions, grève virtuelle, colère de la société civile: la décision de Mark Zuckerberg de ne pas modérer des messages polémiques de Donald Trump la semaine dernière sur sa plateforme Facebook ne passe décidément pas.
« Je démissione de Facebook », a annoncé Timothy Aveni, un ingénieur, sur son profil mardi.
« Je ne peux pas continuer à trouver des excuses » au réseau social, a-t-il expliqué.
Contrairement à Twitter, la plateforme au pouce en l’air a décidé de ne pas intervenir contre un message du président américain – « Les pillages seront immédiatement accueillis par les balles » – au sujet des manifestations en soutien George Floyd qui ont été émaillées d’émeutes.
La mort de cet Afro-américain, asphyxié par un policier blanc à Minneapolis, suscite une vague de révolte aux Etats-Unis.
« Facebook fournit une plateforme qui permet aux hommes politiques de radicaliser des individus et de glorifier la violence. Nous regardons les Etats-Unis basculer dans le même genre de discorde alimentée par les réseaux sociaux qui ont causé la mort de personnes aux Philippines, au Myanmar et au Sri Lanka », a poursuivi Timothy Aveni.
Plusieurs employés ont exprimé leur mécontentement à l’égard de leur patron ce weekend et participé à une grève en ligne lundi.
« Déçus »
Ils estiment que même si Facebook a décidé de laisser la parole des hommes politiques la plus libre possible, les propos du locataire de la Maison Blanche dépassent dans ce cas les limites – celles de l’incitation à la violence.
« Je suis fier d’annoncer qu’à partir d’aujourd’hui, je ne suis plus un employé de Facebook », a tweeté lundi Owen Anderson, un autre ingénieur du groupe californien.
Mark Zuckerberg, le fondateur de la plateforme, a répondu aux questions de ses employés lors d’une réunion hebdomadaire en visioconférence mardi, sans changer d’avis.
A titre « personnel », le jeune milliardaire a condamné la « rhétorique clivante et incendiaire » du président dans un post sur son profil vendredi.
Mais il soutient qu’il ne faut pas supprimer les messages, au nom de la liberté d’expression et de l’intérêt du public à s’informer.
« Nous sommes déçus et stupéfaits par les explications incompréhensibles de Mark sur la décision de maintenir les publications de Trump », regrettent Vanita
Gupta, Sherrilyn Ifill et Rashad Robinson, à la tête de trois importantes organisations de défense des droits civiques aux Etats-Unis.
« Précédent dangereux »
Leur réaction intervient après une conversation téléphonique lundi soir avec M. Zuckerberg et Sheryl Sandberg, la numéro 2 de Facebook.
Ils se sont plaints du refus d’agir sur différents messages sanctionnés par Twitter mais pas par Facebook: celui sur les violences de Minneapolis, mais aussi ceux d’il y a une semaine sur le vote par correspondance.
Twitter les avait signalés comme trompeurs, et avait ajouté la mention « vérifiez les faits », tandis que Mark Zuckerberg rappelait sur Fox News que les plateformes, selon lui, ne devaient pas jouer le rôle « d’arbitres de la vérité en ligne ».
« Il (Mark Zuckerberg) n’a pas fait preuve de compréhension sur la restriction historique et contemporaine du droit de vote et il refuse de reconnaître à quel point Facebook facilite les appels de Trump à la violence contre les manifestants », affirment les trois responsables.
« Mark crée un précédent très dangereux pour d’autres voix qui exprimeraient des propos nocifs dans la même veine sur Facebook », ajoutent-ils.
« Nous sommes reconnaissants que des responsables de groupes de défense des droits civiques aient pris le temps de partager leurs remarques franches et honnêtes avec Mark et Sheryl » a réagi un porte-parole de Facebook au sujet de l’appel téléphonique de lundi soir.
« C’est un moment important pour écouter et nous avons hâte de poursuivre ces conversations », a ajouté ce porte-parole.
Source: AFP