Le conférence de presse du président français Emmanuel Macron donnée au lendemain de la décision du Premier ministre désigné Mostapha Adib de renoncer à former un nouveau gouvernement Liban, a provoqué une réaction de réprobation dans les milieux du camp du 8-mars.
Son discours adressé, dimanche 27 septembre, aux Libanais a atteint le comble de l’insolence, vu qu’il se comporte comme le guide de la République libanaise depuis la tragique explosion du 4 août au port de Beyrouth, a fustigé le quotidien libanais AlAkhbar, avec une note sarcastique.
Le chef d’Etat français a « pris acte de la trahison collective » des partis libanais qui, selon lui, « portent l’entière responsabilité » de l’échec de son initiative. « J’ai honte » pour les dirigeants libanais, a lancé le président français sur un ton grave.
Le journal libanais reproche surtout au président français son alignement à la rhétorique américano-saoudienne sur le règlement de la crise au Liban.
Durant son point de presse, il a spécifiquement accusé le tandem chiite et le Hezbollah en particulier d’avoir torpillé l’initiative française.
Le Hezbollah « ne doit pas se croire plus fort qu’il ne l’est », a tancé Emmanuel Macron. Ce parti « ne peut en même temps être une armée en guerre contre Israël, une milice déchaînée contre les civils en Syrie et un parti respectable au Liban. C’est à lui de démontrer qu’il respecte les Libanais dans leur ensemble. Il a, ces derniers jours, clairement montré le contraire », selon ses propres termes, cités par l’AFP.
Un délai de quatre à six semaines
Tout en assurant qu’il n’abandonnera pas le Liban, le chef de l’Etat français a évoqué « quatre à six semaines » pour que les bailleurs internationaux voient si un gouvernement de mission est encore envisageable ou s’il faut envisager un changement complet de paradigme.
« A l’horizon environ d’un mois, un mois et demi, nous serons obligés de faire le bilan (…). S’il n’y a aucune avancée sur le plan interne, alors nous serons obligés d’envisager une nouvelle phase de manière très claire et deposer la question de confiance: est ce qu’un gouvernement de mission sur la base de la feuille de route est encore possible ?
Ou est-ce qu’il faut à ce moment-là changer la donne et aller peut-être dans une voie plus systémique de recomposition politique au Liban? », a-t-il dit, qualifiant cette piste de « très aventureuse ».
Macron a jugé que faute d’un accord sur les bases évoquées en août, le Liban risquait soit la « guerre civile », soit de continuer de s’enliser avec un gouvernement de « profiteurs ». Et dans tous les cas, que le pays ne pourrait pas compter dans ces conditions sur l’aide internationale dont il a cruellementbesoin.
Formation d’un gouvernement sans le Hezbollah
Des sources proches du 8 mars, citées par le quotidien libanais AlAkhbar, ont estimé que Macron n’était pas juste en tenant le Hezbollah responsable de l’échec de son initiative.
« Le Hezbollah et le mouvement Amal n’ont rompu aucun engagement avec lui, au contraire, ils ont accepté la formation d’un gouvernement de mission indépendant, formé par Mostapha Adib. Ils ont également approuvé 90% du document des réformes.
Constatant que c’est le club des ex-Premiers ministres qui se sont chargés de l’aider à nommer les ministres, sans aucune considération des résultats du scrutin légilsatif, le tandem chiite a refusé de renoncer au portefeuille des Finances. Le Hezbollah ayant plusieurs fois réitéré qu’il était en faveur d’un gouvernement d’entente nationale.
« En ce sens, c’est le président français qui a violé son engagement de former un gouvernement d’entente nationale. C’est lui qui parait contradictoire en évoquant la formation d’un gouvernement représentant toutes les communautés, mais sans que celles-ci n’aient aucun rôle dans la nomination de leurs représentants. Qui devra nommer les ministres ? Veut-il que nous nous engagions à remettre le pays aux anciens chefs de gouvernement? Veut-il que nous acceptions la nomination des 14 ministres par Saad Hariri? Veut-il que nous nous engagions à annuler les résultats des élections législatives? », se sont interrogées ces sources.
Et ces sources de conclure pour Al-Akhbar : « il semble que le seul engagement requis c’est la nécessité de former un gouvernement sans le Hezbollah, comme l’avait recommandé Pompeo (secrétaire d’Etat US)».