Le Pakistan ne permettra pas aux Etats-Unis d’utiliser ses bases militaires, y compris pour d’éventuelles opérations en Afghanistan après le retrait des forces étasuniennes de ce pays. Islamabad confirme de plus en plus activement sa ferme adhésion à l’axe eurasien et multipolaire.
Le Premier ministre pakistanais Imran Khan a déclaré que son pays n’autoriserait pas aux services de renseignement américains d’utiliser des bases militaires sur son sol pour mener des opérations en Afghanistan, après le retrait de l’armée américaine de ce pays voisin.
«Il n’est pas possible d’autoriser les Etats-Unis d’utiliser nos bases pour une quelconque opération en Afghanistan», a déclaré Imran Khan. Il n’a en outre pas manqué de critiquer les gouvernements pakistanais précédents qui avaient donné la possibilité aux USA d’utiliser des bases pakistanaises dans leurs opérations, notamment de drones, en Afghanistan.
Le Premier ministre du Pakistan a également tenu à rappeler que depuis sa prise de fonction en 2018 – les drones américains n’ont lancé aucune attaque contre les territoires afghans à partir du sol pakistanais. L’agence de presse turque Anadolu indique également qu’en mai dernier, le directeur de la CIA William Burns s’était rendu au Pakistan pour tenter à convaincre Imran Khan à changer de position vis-à-vis de l’utilisation des bases pakistanaises par les USA. Une demande rejetée par le Premier ministre pakistanais. Un échec évident pour la partie étasunienne.
S’il est vrai que le Pakistan fut longtemps considéré comme un allié régional important pour Washington, l’évolution de sa politique et les changements internationaux semblent avoir clairement fait changer de cap à Islamabad. Entretenant des relations depuis les dernières années très proches avec Pékin – devenu le premier partenaire économique du Pakistan, ainsi que des relations cordiales avec Moscou et Téhéran.
Fait notoire, ce pays stratégique de plus de 200 millions d’habitants (cinquième population mondiale) et puissance nucléaire, est devenu en 2017, au même titre que l’Inde, membre à part entière de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) en y rejoignant la Chine, la Russie, le Kazakhstan, l’Ouzbékistan, le Kirghizistan et le Tadjikistan. A noter que l’organisation compte également l’Iran en qualité de membre-observateur, avec une forte probabilité qu’il devienne également membre à part entière.
D’ailleurs, le renforcement inédit de l’OCS, y compris lors de l’intégration du Pakistan et de l’Inde en son sein, avait plus que jamais renforcé l’idée que la véritable notion de communauté internationale se trouve bel et bien en Eurasie, compte tenu du poids démographique, civilisationnel, militaire, sans oublier les nouvelles réalités économiques. Et certainement pas en Occident.
Vraisemblablement, ce que n’avait pas prévu Washington c’est que justement le Pakistan puisse prendre une telle distance à son encontre, tout en poursuivant le rapprochement actif avec Pékin et l’intégration au sein du grand espace eurasien, auquel le Pakistan appartient indéniablement. La fermeture d’accès à ses bases aux USA sonne comme un coup dur pour l’establishment étasunien et il n’est certainement pas à exclure que Washington cherchera à punir Islamabad pour cette gifle douloureuse.
D’un autre côté, le Pakistan – étant une puissance régionale et continentale indéniable, possédant une force de frappe qui n’est pas à présenter, se trouvant dans une relation d’alliance avec la Chine et les autres grandes puissances eurasiennes pro-multipolaires, pourrait sans le moindre doute créer plus de problèmes pour la présence US dans la région, que le contraire. Washington le comprend-t-il? Très certainement. Le seul souci c’est qu’au sein de l’establishment étasunien, la réflexion intellectuelle n’est pas toujours au rendez-vous.
Par Mikhail Gamandiy-Egorov
Source: Observateur continental
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