C’est un feuilleton épatant, digne d’un film d’action, que les Palestiniens de la Cisjordanie occupée ont livré ces derniers jours: avec un héros, un vrai et non fictif; avec des soutiens, des vrais et non des comparses ; des ennemis et toute une stratégie pour les fourvoyer et les affronter, une vraie et non imaginaire. Et avec une fin dans toute sa splendeur. Très vraie. Le tout, images vidéo à l’appui.
Pendant les 11 jours qu’il était recherché, autant la chasse à l’homme israélienne était féroce, autant le mouvement de solidarité palestinien qu’il a soulevé était attendrissant.
Les têtes chauves: la stratégie de fourvoiement
Lorsque les soldats israéliens ont attaqué le camp de 140 mille habitants, après l’avoir assiégé, ils leur ont fait croire qu’il se trouvait parmi eux, jouant avec eux au chat et à la souris, et leur livrant des affrontements. De même dans la localité avoisinante Annata et les autres localités du nord de la ville sainte d’al-Qods. Un certain nombre de ses proches ont été arrêtés.
Pour égarer encore davantage les Israéliens, ils ont envoyé maintes fois son nom Oday dans la messagerie de WhatsApp pour amalgamer les algorithmes de la zone qui pourraient être utilisés pour le localiser.
Les médias israéliens ne rapporteront que ce fait : « le fait que Oday n’ait pas utilisé d’appareils électroniques durant sa traque l’a aidé à rester loin de la piste ».
Du camp au nord à la colonie au sud
Finalement, lorsqu’il a fait son apparition à la porte de la colonie Ma’aleh Adumim, l’une de plus grandes de la Cisjordanie, les soldats israéliens ne savaient pas que c’était lui. Il se trouvait à des kilomètres de la zone de recherche ! Le camp palestinien étant au nord d’al-Qods et la colonie israélienne à son sud-est !
Et c’est lui qui a surpris les militaires israéliens qui gardent la colonie. A l’inverse des images de l’opération Shu’fat, ils ne sont pas apparents sur les images vidéo. Ouday savait qu’il livrait son dernier combat!
« Pendant 10 jours, tout le système de sécurité israélien s’est mobilisé pour arrêter un Palestinien qui s’était échappé de la scène d’une fusillade, et qui est finalement arrivé et a mené une autre opération loin de l’endroit où ils s’attendaient à ce qu’il se cache – comment une telle chose peut-elle arriver? », constate amèrement le chroniqueur de la télévision israélienne Channel 14, Halel Rozine.
Jusqu’à la dernière balle
(( Au milieu de la rue, seul , dans le noir, on le voit debout tirant sur eux à bout portant, a fortiori avec le même revolver qu’il avait utilisé auparavant.
Touché à la jambe dans un premier moment, il continuera à tirer, couché sur son côté droit pendant que les militaires israéliens lui tiraient dessus de tous les côtés. On le voit chercher dans sa poche arrière. Selon les images vidéo postées sur les réseaux sociaux, il a essuyé au moins 5 balles avant qu’il ne soit plus capable de tirer. Lorsqu’un soldat israélien s’est approché de lui, il était encore vivant et bougeait la main. Il a essuyé la balle fatale…))
Les médias israéliens lui rapporteront qu’il a blessé un militaire israélien à la main, relayant la version officielle, et qu’il a continué à tirer jusqu’à la dernière balle.
Ce n’est qu’après sa mort que les Israéliens vont apprendre que c’est l’auteur de l’opération de Shu’fat. « Il avait en sa possession une grenade et un couteau », ont-ils argué. On ne comprend pas comment la bombe n’a pas explosé avec tous les tirs de feu qui lui ont criblé le corps.
« Ton salut sur leur poitrine »
Le martyre de Oday comme sa traque ont fait exploser un mouvement de solidarité et de colère dans les régions de la Cisjordanie occupée et la ville sainte d’al-Qods. Des manifestations se sont dirigées vers sa maison natale dans le camp de Shu’fat.
Le groupe « La fosse aux lions », qui a fait son apparition à Naplouse début septembre, via un défilé militaire de ses éléments qui appartiennent à différentes factions de la résistance palestinienne a promis « une nuit et une journée de colère ». Il a juré au martyr dans un communiqué : « Nous jurons que nous t’adresserons le salut dans leur poitrine avant l’aube ».
Il annoncera plus tard avoir réalisé à l’aube trois opérations de tirs de feu contre les soldats de l’occupation. Sur le pont de Jerisim au sud de Naplouse au nord de la Cisjordanie, a proximité du barrage 17 au nord de Naplouse et à proximité de village Deir Charaf à l’ouest.
Dans la ville de Jénine, des résistants et des manifestants se sont fusionnés dans une marche de colère.
Ce jeudi, une grève générale a été observée dans les villes et les villages de la Cisjordanie occupée.
Dont l’Ordre des avocats, les tribunaux civils et militaires, les tribunaux de règlement, les procureurs … Ils ont baptisé la prochaine session des examens de pratique de son nom : « Le martyr Oday al-Tamimi »
« Portez le fusil après moi »
Auparavant, les Palestiniens avaient lu son testament posté sur les réseaux sociaux. Il y a écrit ses derniers mots, son message qu’il leur adresse :
« Moi, le recherché, Ouday al-Tamimi, du camp des martyrs d’al-Shu’fat, mon opération sur le check-point n’est qu’une goutte d’eau dans la mer tumultueuse de la lutte. Je sais que je vais tomber en martyr, tôt ou tard. Je sais que je ne vais pas libérer la Palestine avec cette opération. Mais je l’ai exécutée avec un but précis devant moi: que cette opération puisse inciter des centaines de jeunes à porter le fusil après moi ».
Il est signé le 10 octobre.
Des dizaines de posters et de photos lui ont été dédiés sur les réseaux sociaux, en hommage à son héroïsme. Dans ses photos, il parait être un sportif, qui prend soin de lui. Elégant.
Dans l’une d’entre elles, publiée sur sa page, ses mots sont retentissants: » Nous n’avons jamais craint les conséquences et ne les craindrons jamais. Gare à celui qui croit que nous sommes finis »
Le plus poignant de ces posters est sans doute celui où il est photographié avec des lunettes noires, une veste Adidas, et en dessous un tee-shirt où on peut lire Valentin. C’est comme s’il avait préparé la médiatisation de son martyre.
Ses compagnons de route l’ont complétée. Ils lui ajouteront en arrière fond deux jeunes encagoulés de Koufieh. L’affiche du film… Et leurs mots : « Ne meurs pas avant d’être l’égal (à égal) »… Le titre!
Source: Divers