Alors que l’Algérie commémorait cette semaine le 57e anniversaire des premiers essais nucléaires français dans le Sahara en 1960, la LADDH (Ligue algérienne de défense des droits de l’homme) a annoncé qu’elle allait porter plainte contre la France pour crime contre l’humanité auprès de la Cour pénale internationale de La Haye.
Cette semaine l’Algérie commémore le 57e anniversaire des essais nucléaires français dans le Sahara. Pour la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme (LADDH), c’est aussi l’occasion d’évoquer le sujet des indemnisations qui devraient être versées par la France aux victimes des essais nucléaires. Accusant cette dernière de crime contre l’humanité, la LADDH se dit déterminée à porter plainte auprès de la Cour pénale internationale de La Haye.
« Il était temps pour notre ONG d’utiliser des armes juridiques pour défendre les droits des victimes algériennes. La LADDH porte plainte contre la France pour crimes contre l’humanité pour plusieurs raisons: les conséquences sur l’environnement et les populations, et les conséquences morales. Nous voulons que toute la lumière soit faite sur ces répercussions. Jusqu’à présent, on ne sait pas exactement ce qui ce qui se passe à Reggane et à Tamanrasset (les deux lieus des essais nucléaires, ndlr). Les radiations sont toujours actives, elles peuvent continuer pendant 3 000 à 4 000 ans. Nous saisissons donc le tribunal de La Haye pour dénoncer l’inconscience de la France », a déclaré Houari Kaddour, secrétaire national de la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme dans une interview exclusive à Sputnik.
Si la question de l’indemnisation des victimes est régulièrement mise en avant, l’emploi de la notion de crime contre l’humanité à ce sujet semble, lui, relativement nouveau.
En effet, entre 1960 et 1996, la France a effectué plus de deux cents essais nucléaires, d’abord dans le désert algérien puis en Polynésie française, dont les répercussions sur les populations locales et l’environnement seraient préoccupantes: la LADDH parle de dizaines de milliers de victimes directes et même de centaines de milliers de victimes indirectes en Algérie, touchées par des cancers et des malformations. L’été dernier, des Polynésiens avaient déjà déposé une plainte similaire.
Les objectifs de cette initiative lancée par la LADDH sont à la fois concrets et symboliques:
« Le premier objectif [de cette plainte], c’est d’obtenir que l’État français [décontamine] les sites. Deuxièmement, la France doit arrêter de croire qu’elle peut commettre des crimes sans être jugée », explique M. Kaddour.
En même temps, tout en accusant la France et prônant la restitution de la justice, M. Kaddour insiste sur le fait que la LADDH ne veut pas rentrer en conflit avec la France.
« Ce qu’on veut, c’est que l’humanité vive en paix », insiste-t-il.
Récemment le candidat à la présidentielle en France, Emmanuelle Macron était en déplacement en Algérie où il a également évoqué la colonisation française en général et parlé de crime contre l’humanité.
Pour M. Kaddour, il n’y a rien d’anormal dans cette déclaration:
« Il faut que les Français fassent face à la vérité au regard de la morale et de l’histoire, pour permettre à nos deux nations, l’Algérie et la France, de vivre en paix. Je crois qu’il est temps que les Français et les Algériens abordent tous les problèmes, pas seulement le problème des essais nucléaires», conclut-il.
Le Forum national algérien sur les tests nucléaires français dans le Sahara algérien s’est déroulé à Alger à l’occasion du 57e anniversaire du premier essai nucléaire aérien dans le Sahara algérien le 13 février 1960 dans le cadre de l’opération « Gerboise bleue ». Initialement estimée à 13 kilotonnes, la puissance de cette explosion effectuée à Hammoudia, à 50 km de Reggane, a atteint 60-70 kilotonnes, soit trois fois celle de la bombe d’Hiroshima. Elle a entraîné la projection de radiations dans une zone de 200 km de large et de 100 km de long, alors que les habitations les plus proches se trouvaient à seulement 70 km.
Trois autres essais intitulés « Gerboise blanche », « rouge » et « verte » se sont déroulés dans le sud-ouest de l’Algérie en avril 1960. Plus tard, la France a mené 57 autres essais. Après l’indépendance de l’Algérie, en 1962, 13 essais souterrains ont eu lieu dans le cœur rocheux de la montagne d’In Ecker jusqu’en 1966.
Source: Sputnik