Je crois que nous pouvons tous énormément nous réjouir de la libération de Julian Assange ! C’est une magnifique victoire des peuples pour la liberté d’expression, pour le droit de savoir, pour la protection de tous les lanceurs d’alerte et des véritables journalistes. Acharné à le torturer, l’Empire voulait imposer un exemple pour décourager tous les lanceurs d’alerte. C’est-à-dire pour protéger ses propres crimes de guerre et contre l’humanité. Le but de Washington n’était pas de juger Julian aux États-Unis mais de le faire mourir à petit feu dans les prisons anglaises. S’il y avait eu un procès, il se serait brillamment défendu et aurait infligé une défaite morale à ses accusateurs.
De cette victoire, nous pouvons, je pense, tirer quatre leçons très importantes…
Leçon n° 1. Il faut s’organiser. Je tiens à rappeler que depuis des années, en Belgique, en France et en d’autres pays, de petits comités d’action solidaire se sont constitués et ont effectué un travail de terrain absolument remarquable. Je me souviens qu’il y a quelques années, nous avions organisé à Bruxelles une séance en solidarité avec Julian, c’était avec l’équipe du ciné-club Attac Bruxelles que je salue et j’avais lancé un appel : il nous faudrait des comités de terrain pour défendre Julian, contrer les médiamensonges répandus sur lui, informer dans la rue, dans des petits débats partout. Montrer pourquoi nous avions besoin d’Assange et de Wikileaks.
En Belgique, Marie-France Deprez et d’autres amis ont relevé ce défi. Présents semaine après semaine, année après année, dans les rues de Bruxelles et de Namur, ils ont réussi à créer un véritable mouvement d’opinion directement auprès des citoyens qui a fini par infléchir les grandes ONG et les médias dominants. Magnifique succès !
En France, Viktor Dedaj, Laurent Dauré, Jacqueline Boucher, Serge Regourd et de nombreux autres ont organisé une quantité impressionnante de débats et de manifestations pour la vérité. Des artistes se sont engagés : Corinne Masiero, Lio, Claude Sérillon, Josianne Balasko, Albert Dupontel, Cédric Klapish, Bruno Gaccio, Anne Roumanoff, Pascal Légitimus, Virginie Ledoyen, Bruno Podalydès, Emir Kusturica, Dominique Blanc, Stéphane Foenkinos, Serge Regourd, et bien d’autres ont signé une pétition dès 2019…
Conclusion : le rapport de forces ne change que par la mobilisation des masses populaires. Ce qui est seulement possible par un travail de terrain, patient et de longue durée. Et un beau jour… la situation bascule !
Leçon n° 2. La diabolisation peut être vaincue. C‘était très dur à l’époque : une puissante campagne de diabolisation, organisée par les USA, avait inondé les médias et Internet de calomnies. On lui avait fabriqué et matraqué l’image d’un violeur cynique et d’un hacker sans scrupules. Mais tous ces militants de la bataille de l’info ont réussi à renverser la montagne du mensonge et à mettre l’Empire en échec.
Les éditions Investig’Action ont un petit peu contribué à cette campagne en publiant le petit bouquin très précieux de citations de Julian. Karen Sharpe les a rassemblées et présentées, révélant une pensée très riche sur plein de sujets. Merci Karen ! À lire, méditer, propager !
Leçon n° 3. Les Palestiniens ont sauvé Assange. En résistant aux crimes de guerre d’aujourd’hui, en refusant d’être chassés de leurs terres malgré la cruauté des bombardements, en diffusant avec leurs téléphones les faits réels occultés par le système médiatique, et surtout avec tous ces journalistes palestiniens qui ont donné leur vie pour continuer à informer en sachant que Netanyahu est le plus grand serial killer de tous les temps contre la presse, ce sont eux qui ont changé le rapport de forces. Entre mensonges et vérité, entre États-Unis et peuples résistants, entre médias couchés et médias debout.
Oui, je pense vraiment que Biden le super-menteur a été mis en grandes difficultés par la résistance des Palestiniens. Il tremble pour sa réélection et a jugé qu’il devait lâcher du lest. Ce recul peut et doit nous encourager. Le système impérial multiple ses crimes et se rend de plus en plus détestable. Sur ce terrain, si nous construisons une info libre, bien présentée et bien relayée, nous réussirons à le faire reculer.
Quatrième leçon à tirer : Nous devons absolument protéger les lanceurs d’alerte, TOUS les lanceurs d’alerte. Il y en a beaucoup, je les ai mentionnés dans la préface du petit livre Assange dont je parlais plus haut. Investig’Action lance aujourd’hui un projet important : nous créons sur notre site une rubrique lanceurs d’alerte. Soutenez ce projet, écrivez-nous pour donner un coup de main, aidez à financer !
Dans ce monde de plus en plus guerrier, nous allons avoir besoin de beaucoup de nouveaux Assange. Aidez-nous à les faire connaître et protéger !
S’organiser pour le travail de terrain, affronter intelligemment les mensonges de diabolisation, se connecter avec la Palestine au cœur des combats pour la liberté des peuples et défendre activement tous les lanceurs d’alerte ! Quatre leçons importantes pour gagner ensemble la bataille de l’info !
Regardez bien le reflet ! 2010. À la fenêtre de l’ambassade d’Équateur où il s’est réfugié, Julian affiche sa solidarité avec les Palestiniens bombardés. C’est la même bataille en fait pour démasquer la propagande de guerre.
Michel Collon
Source : Investig’Action