L’armée d’occupation israélienne a affirmé avoir interrompu « d’importantes discussions concernant l’escalade sur le front nord » frontalier avec le Liban. Cette annonce intervient après la prise d’assaut, lundi soir, par des colons de la base militaire de Beit Lid dans le but de libérer des soldats israéliens détenus.
Pour l’armée d’occupation, il s’agit « d’un incident grave qui constitue une infraction pénale et porte atteinte à la sécurité de l’État ».
Le journal Haaretz a rapporté que trois bataillons appartenant à la brigade Nahal ont été convoqués d’urgence depuis la zone située entre Naplouse, Qalqilya et Tulkarem pour les envoyer à Beit Lid. Et de souligner « l’armée était occupée ces dernières 24 heures par les préparatifs sur le front nord, qui auaraient pu aboutir à une guerre, mais elle a été contrainte de tout arrêter à la suite des événements à Beit Lid ».
Que s’est-il passé lundi ?
Dans les détails, des dizaines de manifestants des factions juives d’extrême droite, dont certains étaient masqués ainsi que des militants politiques, ont pris d’assaut le centre du tribunal militaire de la base israélienne de Beit Lid où étaient détenus, depuis lundi matin, 9 soldats israéliens pour interrogatoire. Ils sont soupçonnés d’avoir commis des transgressions morales et d’avoir torturé des combattants des Brigades al-Qassam, dans la prison militaire secrète de Sde Teiman, également appelée ‘Guantanamo d’Israël’.
Des images diffusées sur les réseaux sociaux ont montré des dizaines d’Israéliens tentant de prendre d’assaut le bâtiment du tribunal militaire pour libérer les soldats israéliens condamnés, bien que le tribunal ait considérablement réduit leurs peines en raison des pressions exercées par la droite, en particulier les ministres Itamar Ben Gvir et Bezalel Smotrich.
🚨 מספר חברי כנסת ושרים הגיעו לבסיס שדה תימן והשתתפו בהפגנה במקום. ברקע – קריאות ״מוות למחבלים״, וגם: ״הרצי הביתה״. pic.twitter.com/v1GwkfzjV6
— Asslan Khalil (@KhalilAsslan) July 29, 2024
🚨 אירוע חריג בבסיס שדה תימן בנגב: חוקרי מצ״ח פשטו בשעה האחרונה על הבסיס, ופעלו לעכב לחקירה כ-10 לוחמי מילואים, ששמרו על מחבלי הנוחבה בבסיס. זאת בעקבות חשד לפרשת התעללות חמורה במחבל, שפונה מהמקום במצב קשה עם פציעות חמורות בפי הטבעת. עם הגעת חוקרי מצ״ח לבסיס – החלו עימותים במקום,… pic.twitter.com/pIxv3aOM71
— Asslan Khalil (@KhalilAsslan) July 29, 2024
Une discussion tendue a aussi opposé des soldats aux enquêteurs de la police militaire dans la prison militaire de Sde Timan.
Après son arrivée précipitée à la base, le chef d’état-major de l’armée d’occupation, Herzi Halevy, a déclaré dans un communiqué que « la tentative de prendre d’assaut la base de Beit Lid « met en danger la sécurité de l’État en pleine guerre, et les actions de ce genre sont interdites… ».
De profonds désaccords au sein des niveaux politique et militaire concernant l’évaluation de l’incident
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu et le ministre de la Sécurité Yoav Gallant ont dénoncé la tentative d’assaut du camp par des extrémistes.
Gallant a déclaré : « Personne ne peut prendre d’assaut les bases de Tsahal, même en période de détresse. La loi s’applique à tout le monde ».
Le bureau du Premier ministre a appelé à « calmer la situation à Sde Teiman et a fermement condamné la prise d’assaut d’une base de l’armée israélienne ».
Parallèlement, le ministre des Finances Bezalel Smotrich a dénoncé le traitement réservé aux soldats et a publié un clip vidéo sur la plateforme X, dans lequel il a déclaré que « les soldats devraient être traités comme des héros et non comme des criminels ».
Dans le même temps, l’armée d’occupation israélienne a révélé que « les discussions opérationnelles liées au front nord ont été interrompues en raison des turbulences dans la prison de Sde Teiman, où le chef d’état-major a été contraint de s’y rendre. D’autre part, nous avons dépêché des forces des missions défensives opérationnelles en Cisjordanie vers Beit Lid »
Pour l’armée d’occupation, « des soldats réservistes figuraient parmi les manifestants masqués et armés ayant participé aux troubles. Une enquête est en cours et des sanctions sont à prévoir. L’intrusion dans une base militaire constitue une infraction grave et une atteinte à la sécurité de l’État. Sur les 1 200 manifestants présents, plusieurs dizaines ont forcé l’entrée de la base. ».
De son côté, le chef de l’opposition Yaïr Lapid a exprimé son profond mécontentement face aux affrontements à Beit Lid et à l’attaque menée par la droite, déclarant : « Nous ne sommes pas au bord du gouffre, nous sommes au coeur du gouffre… Toutes les lignes rouges ont été franchies aujourd’hui… Un dangereux groupe fasciste menace l’existence de l’État d’Israël ».
Choc au sein de l’armée d’occupation: la police encourage les émeutes
Le journal de droite Yediot Aharonot a révélé que « des sources militaires ont déclaré que les forces militaires avaient supplié la police d’envoyer des forces d’évacuation vers la base de Beit Lid afin d’empêcher les troubles à Sde Teiman, mais la police a délibérément refusé ».
Et de poursuivre: « La police nous a dit que les soldats devraient résoudre cette affaire, comme s’ils encourageaient la poursuite des émeutes ».
Les dessous des troubles
Pour sa part, le site israélien Makan a rapporté qu’après l’arrivée lundi matin des enquêteurs de la police militaire au centre de détention de Sde Teiman, dans le cadre de l’enquête menée par l’armée israélienne contre des réservistes ayant gravement torturé un détenu palestinien de Gaza, Ben Gvir puis Smotrich ont dénoncé cette mesure, puis des dizaines de personnes protestant contre l’interrogatoire des militaires sont arrivées au centre de détention.
الأحداث ما زالت تتدحرج في بيت ليد
قام أنصار اليمين الصهيوني باقتحام المحكمة العسكرية في بيت ليد قبل قليل – من يلبسون الكيبا (القبعة) الملونة أو البيضاء هم من أنصار الصهيونية الدينية (جماعة بن غفير) والسوداء من الحريديم. pic.twitter.com/1TCgzaiZrZ
— yaseenizeddeen (@yaseenizeddeen) July 29, 2024
Des affrontements ont alors éclaté entre les militaires du centre de détention et les enquêteurs de la police militaire arrivés sur place. Certains des militaires présents sur les lieux ont tenté de s’enfuir, tandis que d’autres ont menacé de se barricader sur place, et un certain nombre de militaires ont été arrêtés pour être interrogés, selon le site.
The government-affiliated thugs are still trying to break into Beit Lid base where the detained (alleged) rapists are held.
Video: Bar Peleg pic.twitter.com/o4VFXdDXAc
— B.M. (@ireallyhateyou) July 29, 2024
Le porte-parole de Tsahal a indiqué : « En raison de soupçons selon lesquels un détenu a été gravement blessé dans le centre de détention de Sde Teiman, une enquête a été ouverte par la police militaire sur ordre du procureur militaire, le général Yifat Tomer Yerushalmi. »
Bien qu’il n’ait aucune autorité sur l’armée, le ministre de la Sécurité nationale, le député Itamar Ben Gvir, a commenté l’incident, écrivant sur son compte X : « Les images des officiers de la police militaire venant arrêter nos meilleurs héros à Sde Teiman sont tout simplement honteuses. Je recommande au ministre de la Sécurité, au chef d’état-major et aux services de sécurité de soutenir les combattants et de tirer les leçons des services des prisons et des bases. L’ère de la tolérance envers les terroristes est révolue. Nos combattants ont besoin de soutien et et d’assistance ».
D’autres membres de son parti d’extrême droite Otzma Yehudit ont annoncé qu’ils se rendraient dans ce centre du sud d’Israël pour protester contre la détention des soldats.
Le ministre des Finances Bezalel Smotrich a également déclaré : « Les soldats de Tsahal méritent des éloges… Les soldats de Tsahal ne seront pas arrêtés comme des criminels… Je vous appelle à lâcher prise sur nos combattants héroïques ».
Plus tard, des politiciens d’extrême droite ont exhorté leurs partisans à venir manifester devant le centre de détention où les soldats étaient détenus.
Des législateurs et des militants d’extrême droite, dont Zvi Sukkot, membre de la Knesset du parti ultranationaliste Sionisme religieux, ont pris d’assaut la base sur fond d’une manifestation de colère à l’extérieur.
Sukkot a déclaré : « Nous ne pouvons pas enquêter sur les soldats tant que nous n’aurons pas enquêté sur ceux qui ont échoué à empêcher le 7 octobre ».
Le chef de la commission des affaires étrangères et de la sécurité de la Knesset, Yuli Edelstein, a également annoncé, au milieu des huées et des dénonciations, son intention de tenir une séance d’urgence mardi pour discuter de la situation.
« Je ne contribuerai pas à des images comme celles que nous avons vues aujourd’hui à la base de Sde Teiman », a déclaré Edelstein. « La situation dans laquelle des policiers militaires masqués font une descente dans une base de Tsahal est inacceptable pour moi, et je ne permettrai pas que cela se reproduise. Nos soldats ne sont pas des criminels et ces poursuites ignobles pour nos soldats sont inacceptables pour moi ».
« Le Guantanamo d’Israël »
Plus tôt lundi, le journal américain Washington Post a publié une enquête faisant état de la mort d’au moins 13 prisonniers palestiniens dans les geôles de l’occupation israélienne depuis le 7 octobre, à l’exception des détenus de Gaza, selon l’organisation « Médecins pour les droits de l’homme ».
Selon l’enquête journalistique et les organisations de défense des droits de l’homme, « les conditions de prison et de détention en Israël se sont considérablement détériorées et comprennent des violences fréquentes, la privation de nourriture et des soins médicaux, ainsi que des abus physiques et mentaux contre les prisonniers de sécurité ».
Le Washington Post s’est entretenu avec 11 anciens prisonniers de sécurité et six avocats, et a également examiné les rapports d’autopsie qui ont révélé de graves violences et mauvais traitements de la part du service pénitentiaire israélien.
En mai dernier, l’armée israélienne a affirmé enquêter sur des informations faisant état de mauvais traitements et de torture sur des détenus palestiniens à Sde Teiman connu pour être le Guantanamo d’Israël, suites à de multiples informations faisant état de graves mauvais traitements.
Tomer Yerushalmi, le procureur militaire, a déclaré « qu’à la fin du mois de mai, les militaires avaient ouvert 70 enquêtes et annoncé qu’ils cesseraient progressivement d’utiliser Sde Teiman ».