Chaque fois qu’il y a une attaque chimique en Syrie d’envergure, il faut à tout prix ramener à l’esprit l’attaque chimique de la Ghouta orientale en 2013 et scruter la conjoncture dans laquelle elle intervient.
Plus que toute autre attaque, celle de Khan Cheikhoun à Idleb qui a causé ce mardi la mort de 58 personnes au moins dont 11 enfants, nécessite cette précaution.
Dans ce pays en proie depuis 7 années à une guerre internationale, dans le but de renverser son régime, pilier de l’axe de la Résistance au Moyen Orient, toutes les horreurs ont été utilisées. Dont celles la plus infâme est sans aucun doute lorsqu’elles sont conjuguées à un mensonge éhonté. La crise syrienne regorge de crimes commis par les rebelles syriens et dont la responsabilité a été attribuée au pouvoir syrien, dans le but de le diaboliser et de ternir son image.
Mais plus jamais la dernière attaque s’inscrit dans une conjoncture qui désinculpe le pouvoir, et inversement suspecte ses adversaires.
Et pour cause :
Du côté du pouvoir syrien, son arsenal chimique a été démantelé et transféré en dehors du pays depuis 2014. Alors que ce n’est pas le cas avec le front al-Nosra, branche d’Al-Qaïda en Syrie, lequel contrôle cette localité d’Idleb dans le cadre de la coalition de rebelles baptisée Hayat- Fateh al-Cham et qui détient aussi des agents chimiques.
De plus, il n’a pas besoin de recourir à un tel armement dans sa lutte contre les groupes terroristes, d’autant plus qu’il se sait très bien sous la supervision de plusieurs acteurs internationaux et régionaux prêts à le massacrer dans les instances internationales. Alors que le contraire n’est pas du tout vrai : les cas qui impliquent les rebelles et l’opposition ne sont jamais stigmatisés.
De plus, et c’est l’essentiel, la conjoncture actuelle aussi bien sur le terrain qu’au niveau politique lui est nettement favorable.
Militairement, dans la foulée de la reconquête d’Alep, ses offensives dans la province nord-est d’Alep, et la province nord de Hama, réalisent des avancées importantes.
Et politiquement, et c’est là que culmine son avantage: la nouvelle administration américaine vient de prendre une position mémorable, en affichant ne pas du tout être intéressée par le renversement du président syrien. Comme l’ont déclaré haut et fort la semaine passée aussi bien le secrétaire d’Etat pour les AE, Rex Tillerson et la représentante des Etats-Unis aux Nations Unies.
Et il est même question d’un message envoyé par le président américain Donald Trump au président Bachar al-Assad, via la sénatrice démocrate Tulsi Gabbard, dans le but de coordonner les efforts dans la lutte contre les jihadistes takfiristes : désormais première priorité de la nouvelle administration américaine.
Ce qui reflète un bouleversement majeur dans la politique américaine, laquelle ne répugne plus de dialoguer avec le pouvoir syrien et consacre sa légitimité internationale.
Or c’est là que le mât blesse pour les adversaires du pouvoir syrien.
Les mêmes raisons qui écartent la thèse de l’implication des forces syriennes dans cette attaque justifient son attribution aux groupes terroristes, de concert avec leurs alliés et sponsors régionaux et internationaux.
Ils ont un précédent inoubliable : celui de l’attaque de la Ghouta orientale en 2013, laquelle avait couté la vie à des centaines de civils.
Elle avait été perpétrée lors de l’arrivée d’une délégation onusienne en Syrie, chargée d’enquêter sur des attaques chimiques commises dans plusieurs régions, mais surtout quelques jours après la mise en garde de l’ex-président américain Barack Obama d’intervenir directement en Syrie au cas où le régime utilisait des armes chimiques. Chose que les rebelles et leurs sponsors régionaux et internationaux ambitionnaient coûte que coûte.
La réaction des ces derniers rappelle fortement leurs réactions en 2013.
Accusations frénétiques contre le pouvoir syrien de la part des capitales occidentales et régionales concernées par la guerre contre la Syrie : Paris, Londres et Ankara en tête. Lesquelles ne prennent nullement en compte les dénis syriens. Ni russes cette fois-ci.
Exploitation mesquine en grandes pompes de la tragédie par des opposants à l’étranger. Ceci s’est visiblement manifesté lors de la conférence internationale sur l’avenir de la Syrie – autre élément de la conjoncture actuelle- réunie ce mercredi à Bruxelles lorsque Diaeddin al-Zamel, un travailleur pour l’Union des organisations syriennes de secours et soins médicaux (UOSSM), une ONG basée en France, a été le premier à informer les autres participants, venus de 60 pays. Usant de toute une mise en scène sur « des images sinistres de cadavres, dont beaucoup d’enfants, les yeux noirs grands ouverts. Mais sans vie ».
Loin de cette mise en scène macabre, au dépens du sang du peuple syrien, comme lors de l’attaque de la Ghouta, il est bien clair que c’est la position américaine qui est dans le collimateur de l’attaque d’Idleb.
En 2013, Obama avait fini par suspecter la version de l’opposition des faits et s’est abstenu de toute frappe militaire, se contentant de réclamer le démantèlement de l’arsenal chimique syrien.
Cette fois-ci, il faudrait attendre la position de Donald Trump . Les Russes aussi ne devraient pas tarder à interférer.