Au lendemain de l’attaque terroriste de Sourgout, revendiquée par le groupe takfiro-wahhabite Daesh, Emmanuel Macron évoquait la coopération internationale. En creux, le Président français semblait ici confirmer son désir plus ou moins assumé d’un rapprochement avec la Russie:
Mais au-delà du tweet, quelle politique? Pour l’ancien député et magistrat anti-terroriste Alain Marsaud, le Président « a pris la mesure de l’obligation que nous avons d’être en coopération avec l’ensemble des acteurs, quels qu’ils soient »:
Regrettant le moralisme qui avait conquis les esprits, Alain Marsaud note une évolution: « on ne veut plus être sélectif comme on l’a fait pendant trop d’années, en disant il y a la bonne coopération avec des gens fréquentables et une mauvaise avec ceux qui le seraient moins ».
Une inflexion réaliste, qui le fait regarder vers l’Est: « je crois que nous allons reprendre langue avec nos amis russes », dit-il évoquant de surcroît son voyage prochain en Russie.
Une nouvelle alliance ?
Ainsi les antagonismes et jeux d’alliances se retrouvent-ils bouleversés: « nous avons repris nos relations avec certains services syriens » déclare-t-il, avant d’ajouter: « [les services français] sont en train de rediscuter avec des interlocuteurs du temps des années Sarkozy ». Car en effet, la France avait rompu avec ces derniers « dans les années 2012-13, de manière un peu brutale… même si effectivement les services syriens sont considérés comme extrêmement brutaux ».
Rappelons qu’en mai 2012, l’ambassadeur de Syrie Lamia Chakkour était expulsé de France.
« [les services français] sont en train de rediscuter avec des interlocuteurs du temps des années Sarkozy ».
Un retour à la normale diplomatique après la Présidence Hollande? Les divergences s’estompant, de nouvelles perspectives s’offriraient donc aux services de renseignement: « la nouvelle politique étrangère initiée par Messieurs Macron et Le Drian va vers un rapprochement, même si ça fait hurler, sur la Syrie ». « Nous serons sur la même ligne diplomatique, bon an mal an, que la Russie », constate-t-il avant de poursuivre: « il n’y a pas de raisons que nous ne soyons pas d’accord sur le renseignement. »
Aujourd’hui, nécessité semble faire loi: « nous avons besoin de savoir ce qui se passe dans ces pays ». Si la France y est peu présente, elle devrait alors compter sur d’autres: « aujourd’hui, les meilleurs observateurs sur la zone Syrie et Irak, sont les services russes et syriens. On aime ou on n’aime pas, mais c’est comme ça ». Ce qui pourrait conduire la France à pousser plus avant ses relations: « après, nous serons aussi amenés à reprendre avec les services iraniens, même si cela peut faire de la peine à l’Arabie Saoudite. »
«Il faut des preuves de bonne foi de part et d’autre, » concède Marsaud. Côté français, cette bonne foi serait la fin de l’équivoque face au takfirisme: « on ne peut pas soutenir Al-Nosra et combattre Daesh. Il y a un ennemi global. Il s’appelle Al-Nosra, Daesh, Boko Haram ».
Les médias freinent
Mais cette équivoque est-elle encore entretenue? Alain Marsaud, qui a quitté la semaine passée le plateau de BFM TV, porte un regard sévère sur l’opinion médiatique: « si on écoute certains journalistes ou certains hommes politiques, on a l’impression que ce sont les témoins de Jéhovah qui commettent des attentats! ». Et notre interlocuteur d’asséner: « il faut mettre les choses au point: si on ne nomme pas l’ennemi, on n’a aucune chance de le vaincre ».
Source: Avec Sputnik