Révélations fracassantes de l’ex-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères du Qatar Hamad Ben Jassem : l’Arabie saoudite qui a confié à son pays la charge du dossier de la crise syrienne, estimant que la Syrie a été comme « un gibier » que se sont arrachés aussi bien son pays que l’Arabie au début de la crise.
M. Ben Jassem a tenu ces propos lors d’un entretien accordé à la télévision qatarie. Il semble vouloir craindre que les liens infestes entretenus avec des groupes terroristes en Syrie ne soient adossés à son pays seulement, alors que l’Arabie saoudite parait pour sa part vouloir être innocentée.
Les relations entre les deux pays sont au plus mal depuis plusieurs mois, depuis que Ryad a accusé Doha d’entretenir des lien avec l’Iran, et avec « les groupes terroristes ».
« Au début de la crise (syrienne, ndlr), je me suis dirigé en Arabie saoudite et j’ai rencontré le roi défunt Abdallah Ben Abdel Aziz à la demande du prince père, et je lui ai parlé de la situation en Syrie. Il m’a dit : nous sommes avec vous. Suivez ce sujet et nous coordonnerons avec vous. Mais restez vous-mêmes en charge de ce sujet », a-t-il indiqué.
« Nous nous sommes arrachés ce gibier qui nous a finalement échappé alors qu’on se l’arrachait », a-t-il ajouté, assurant qu’il n’avait aucune rancune à l’encontre du président syrien Bachar al-Assad « qui a été notre ami ».
« Mais vous qui étiez avec nous dans la même tranchée, vous avez changé. Dites-le nous pour que l’on puisse changer aussi », a-t-il reproché à ses voisins, les dirigeants des pays du Golfe.
Passant toujours aux aveux, Ben Jassem poursuit ses révélations qui ne sont plus un secret depuis bien longtemps. Il a évoqué une implication de la part de Washington et d’Ankara dans la guerre en Syrie, ayant même atteint le niveau de soutenir les miliciens du front al-Nosra, branche d’Al-Qaïda en Syrie, rebaptisée front Fatah al-Cham et combattant à l’heure actuelle dans le cadre de la coalition Hayat Fatah al-Cham, dans la province d’Idleb en particulier.
« Nous avons des preuves entières comment nous avons pris en charge ce dossier et tout ce qui allait en Turquie se faisait en coordination avec les forces américaines. Tout ce qui était distribué l’était à travers les forces américaines, les Turcs, les frères en Arabie et nous. Tous sont présents militairement sur le terrain », a-t-il poursuivi.
Mais passant aux liens avec les deux émanations d’Al-Qaïda, le front al-Nosra et Daech, le responsable qatari fait preuve de mois de franchise.
Et de poursuivre : « peut-être que des erreurs ont pu se glisser parfois, et qu’une faction ait été soutenue pendant un laps de temps. Mais pas Daech. C’est une affaire exagérée. Peut-être qu’il y a eu une relation avec le Nosra, peut-être, par Dieu je n’en sais rien, mais je dis quand bien même, lorsque le Nosra est devenue inadmissible, ce soutien a été arrêté et on s’est concentré sur la libération de la Syrie ».
Ben Jassem s’est aussi prononcé sur les relations entre son pays et l’entité sioniste, révélant qu’elles ont été amorcées depuis la conférence de Madrid.
« Apres la conférence de Madrid, l’optimisme était de mise sur l’établissement de la paix. Et franchement parlant,…, on tentait de se rapprocher des Etats-Unis. Il faut établir des relations avec Israël pour que beaucoup de portes s’ouvrent en Amérique. Les relations ont évolué jusqu’à l’ouverture d’un bureau à Doha », a-t-il expliqué.
Selon lui, de nombreux pays de la région traitent avec Israël et qu’il y a des rencontres entre les dirigeants, notamment en Mer rouge.
« Je sais qu’une certaine conception du processus de paix est envisagée et véhiculée et je sais que ca ne marchera pas », a-t-il poursuivi.
Et de déplorer : « Le problème essentiel réside dans les relations israéliennes trop intimes entretenues par certains frères. Je ne suis pas contre. Elles peuvent être positives. Mais je les avertis et je voudrais qu’ils soient avisés qu’elles devraient se faire sur des bases équitables qui ne sacrifient pas les droits palestiniens, Al-Quds ni les postulats arabes. Sinon, nous sommes tout-à-fait avec eux pour établir la paix. Nous sommes avec la paix et l’accalmie et pour que les gens vivent normalement dans cette région ».
Et de conclure sur ce dossier : « Nous courons tous après l’amitié avec Israël ? Qui donc parle d’al-Quds ? Nous parlons aujourd’hui sur la façon par laquelle nous allons normaliser avec Israël »