Interrogé à l’Assemblé nationale sur les relations entre l’école islamique de pensée de l’Arabie Saoudite et le terrorisme international, le très rigoriste Abdeljalil Ben Salem a évoqué le lien idéologique qui unit les wahhabites et les terroristes. Il a été immédiatement suspendu et remplacé par le ministre de la Justice.
Il est la dernière personne que l’on s’attendait à voir critiquer le royaume des Saouds. Sa nomination au poste de ministre en charge des affaires religieuses avait déjà porté un coup sévère à l’image « modérée » du gouvernement islamiste du parti Enahda.
Ancien recteur de la Mosquée Zitouna, vieille de plus de 1000 ans, il s’était notamment illustré en évoquant la supériorité de la loi islamique sur le droit civil.
C’est pourtant bien lui qui, lors d’une session de questions-réponse à l’Assemblée nationale tunisienne a déclaré: « Ce qu’on voit dans le monde islamique comme extrémisme et terrorisme provient de cette école (wahhabite), que ce soit de bonne ou de mauvaise foi (…). Ce genre de pensée, et cette école, ne peuvent qu’engendrer de l’extrémisme ».
Il répondait à une question d’Aydem Aloui, député du Front Populaire (gauche, opposition) qui lui demandait quand il allait « déclarer la guerre à l’idéologie wahabite, qui a envahi la Tunisie et qui est une idéologie que tous les républicains et les démocrates du monde considèrent comme une idéologie terroriste ».
Le ministre s’est alors vanté d’avoir conseillé à l’ambassadeur d’Arabie Saoudite: « Réformez votre école, car le terrorisme historiquement vient de là. Je vous dis cela avec amour et modestie », avant d’admettre que l’Islam tunisien était différent et que le wahabisme prenait une place trop importante dans le monde musulman.
Youssef Chahed, le chef du gouvernement l’a par la suite relevé de ses fonctions au motif que ses déclarations avaient « porté atteinte aux fondements et principes de la diplomatie tunisienne ».
Un autre responsable du parti Enahda au pouvoir a ajouté que les relations avec l’Arabie Saoudite relevaient de la « sécurité nationale ». Un avis que ne partage pas Aydem Aloui pour qui l’influence de l’Arabie Saoudite wahabite menace la souveraineté de la Tunisie.
La Tunisie est considérée comme le seul exemple de transition démocratique réussi suite aux « Printemps arabe » et le gouvernement Enahda au pouvoir en Tunisie comme un modèle d’islamisme politique modéré, malgré ses liens avérés avec les Frères Musulmans, une organisation considérée comme terroriste par l’Égypte, la Russie et… l’Arabie Saoudite.
Source: Sputnik