Le FMI a lancé vendredi une bouée de sauvetage à l’Egypte en lui accordant une ligne de crédit de 12 milliards de dollars pour l’aider à surmonter une profonde crise économique doublée de troubles sociaux.
Les autorités du Caire vont recevoir dès maintenant un premier prêt de 2,7 milliards de dollars du Fonds monétaire international et devront mettre en oeuvre une série de difficiles réformes pour percevoir les tranches restantes dans les trois prochaines années.
Selon le Fonds, ces mesures permettront de « rétablir la compétitivité », « doper la croissance et créer des emplois tout en protégeant les plus vulnérables », assure un bref communiqué de l’institution.
Mais la population doit encore être convaincue. Pour obtenir le feu vert du FMI, le gouvernement du président Abdel Fattah al-Sissi a déjà entrepris plusieurs réformes qui ont alimenté un mécontentement croissant dans le pays.
Sous la pression du FMI, le gouvernement a commencé à réduire drastiquement ses subventions publiques qui grèvent son budget mais permettaient de maintenir artificiellement de faibles prix à la pompe. Résultat: le litre d’essence a flambé de près de 50%.
Le pays a également accepté de laisser flotter librement sa monnaie, provoquant une dépréciation de 50% par rapport au dollar, et s’est doté d’une taxe sur la valeur ajoutée (TVA) qui risque d’augmenter le coût de la vie, même si les produits de première nécessité, comme le pain, en sont exemptés.
Les autorités, qui devront également geler les embauches de fonctionnaires, n’ont guère le choix: plus de cinq ans après la révolte de 2011 qui a renversé Hosni Moubarak, l’économie souffre de l’instabilité politique et des violences qui ont chassé touristes et investisseurs étrangers.
Les caisses de l’Etat ont également été mises à rude épreuve par le poids des dépenses militaires en Egypte, engagée dans l’intervention de la coalition saoudienne au Yémen et aux prises avec le groupe takfiro-wahhabite Daesh.
Réformes ‘difficiles mais inévitables’
Le président Sissi a dû monter au créneau pour défendre des réformes « difficiles mais inévitables ».
Le FMI assure lui que le programme économique négocié avec Le Caire prévoit des mécanismes d’aide destinés aux plus défavorisés, dans un pays où un tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté.
« Même si le FMI a changé et ne demande pas les mêmes mesures d’austérité que dans le passé, la réalité sur le terrain est que ce programme de réformes va être extrêmement compliqué à mettre en oeuvre », assure à l’AFP Bessma Momani, experte du monde arabe au Centre for International Governance Innovation.
La directrice générale du FMI, Christine Lagarde, a elle-même reconnu vendredi que « les risques qui pèsent sur l’application du programme sont importants mais sont atténués par la solidité du paquet de mesures (….) et le large soutien politique en faveur des objectifs du programme » ainsi que « d’ambitieuses reformes ».
Dans un pays où même les produits de première nécessité comme le blé sont importés, la pénurie de devises étrangères a fait exploser les prix, notamment du sucre, alimentant des mouvements de protestation.
La police égyptienne a mis fin vendredi à une série de petites manifestations après des appels à protester contre la hausse du coût de la vie, pour le moment peu suivies dans le pays.
« La montée du mécontentement de la population, notamment chez les groupes les plus vulnérables, en raison de la hausse du coût de la vie est inquiétante », a souligné vendredi l’agence de notation Standard and Poor’s, évoquant notamment le fort taux de chômage chez les plus jeunes.
La croissance économique reste par ailleurs morose pour un pays en développement et devrait ralentir à 3,8% cette année, contre 4,2% en 2015, selon le FMI.
Fin 2012, le FMI avait déjà été appelé à la rescousse par Le Caire mais les discussions sur un plan d’aide de 4,8 milliards de dollars avaient été abandonnées face à l’instabilité politique dans le pays.
Avec cette nouvelle ligne de crédit, le FMI consolide sa présence dans la région où il apporte déjà son assistance financière à la Tunisie et à l’Irak.
Source: Agences