Les Etats-Unis, qui multiplient les mesures protectionnistes contre leurs partenaires, pourraient être les grands perdants de la guerre commerciale, estime mercredi le FMI qui a élaboré quatre scénarios pour tenter d’évaluer les conséquences du conflit.
« Alors que tous les pays seront à terme plus affaiblis, l’économie américaine est particulièrement vulnérable parce qu’une grande part de son commerce sera sous le coup de mesures de représailles », juge dans un blog Christine Lagarde, la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), dans la perspective de la réunion du G20 Finances cette semaine à Buenos Aires.
« Et une réduction du PIB ne sera pas le seul coût », prévient-elle.
Jusqu’alors, la dirigeante de l’institution de Washington martelait qu’une guerre commerciale ne ferait que des perdants. Mi-juin, lors de la présentation de la dernière évaluation de l’économie américaine, elle avait évoqué le conflit nourri des Etats-Unis et la Chine, évoquant des ondes de choc pour les deux premières puissances mondiales.
Maurice Obstfeld, l’économiste en chef du FMI, s’était lui-même montré plus pessimiste lundi, estimant que les tensions commerciales représentaient « la plus grande menace à court terme pour la croissance mondiale », à l’occasion de la publication des prévisions actualisées pour la croissance mondiale.
Le président américain Donald Trump a pris ces derniers mois un virage résolument protectionniste en imposant tous azimuts des taxes douanières sur des dizaines de milliards de dollars de marchandises, chinoises en particulier.
Les principaux partenaires commerciaux des Etats-Unis, dont le Canada, la Chine, l’Union européenne et le Mexique, ont répliqué en annonçant des taxes douanières sur des dizaines de milliards de marchandises américaines.
Le FMI a estimé que le PIB mondial pourrait être réduit de 0,5% d’ici 2020, soit plus de 400 milliards de dollars.
Pic de la croissance?
Si la prévision de croissance pour l’économie de la planète a été maintenue à 3,9% pour cette année et l’an prochain, « cela pourrait être un sommet », estime Christine Lagarde.
« La croissance a déjà commencé à ralentir dans la zone euro, au Japon et au Royaume-Uni », note-t-elle, soulignant par ailleurs que les effets positifs de la réforme fiscale sur l’économie américaine, adoptée fin 2017, allaient, eux, s’estomper.
« D’une manière générale, les effets négatifs sont plus importants pour l’économie américaine que pour les autres économies », résument les économistes du FMI dans leur « note de surveillance » faisant état de quatre scénarios.
Le premier prend en compte les tarifs douaniers américains déjà en oeuvre: 25% sur les importations d’acier, 10% sur l’aluminium (depuis mars), 25% sur 50 milliards de dollars d’importations chinoises et les représailles contre les marchandises américaines (appliquées en juillet).
Le deuxième scénario ajoute les 10% de taxes américaines supplémentaires sur 200 milliards de dollars d’importations chinoises additionnelles envisagées pour septembre.
Le troisième incorpore les 25% de tarifs douaniers américains sur les importations de voitures et les représailles éventuelles qui pourraient intervenir à la fin de l’été ou à l’automne.
Le dernier scénario intègre en outre d’autres composantes comme une détérioration de la confiance combinée à une diminution des investissements dans les secteurs manufacturiers notamment.
L’institution souligne que dans les trois premières hypothèses, les Etats-Unis pourraient faire face à des représailles de toutes parts alors que les autres économies pourraient réorganiser leurs flux commerciaux en évitant les Etats-Unis.
Dans le dernier scénario, le plus pessimiste, parmi les économies affectées, le PIB américain pourrait être impacté à hauteur de 0,8% la première année, suivi de celui de l’Asie émergente (-0,7%), de l’Amérique latine et du Japon (-0,6%). La France et le reste du monde pourraient perdre environ 0,3%.
Dans son blog, Christine Lagarde pointe enfin du doigt un autre problème à l’horizon, celui des répercussions sur les pays émergents. Entre mai et juin, 14 milliards de dollars ont été retirés de ces marchés, engendrant des hausses d’intérêt par les banques centrales.
Source: AFP