Au moins dix chiites ont été tués lundi lorsque la police a ouvert le feu sur une cérémonie religieuse à Kano, dans le nord du Nigeria.
« Dix corps ont été emmenés dans un camion de police », a déclaré à l’AFP Kabiru Mudassir, témoin de la scène.
« La police est arrivée et a commencé à tirer des gaz lacrymogènes sur la procession des chiites pour les disperser », a raconté Ilyasu Ammani, vendeur de fruits et légumes présent sur les lieux, qui lui affirme avoir vu « 15 cadavres sur le sol, avant que la police ne les évacue. »
La police a ouvert le feu sur la foule, alors que des membres du Mouvement Islamique du Nigeria (IMN), groupe chiite religieux, marchaient pour le traditionnel « Arba’een Trek », pèlerinage chiite, qui se déroule 40 jours après la fête de l’Achoura qui celebre le martyre du petit-fils du prophete Mohammad (s).
Selon l’AFP, de son côté, le porte-parole de la police de Kano, Rabiu Yusuf, a affirmé que les affrontements ont fait 9 morts, dont un officier police.
« Des milliers de chiites obstruaient la voie publique, empêchant les innocents automobilistes (de circuler), et perturbant la paix publique », a-t-il justifié.
« Armés d’arcs et de flèches, ainsi que d’armes dangereuses, ils ont tué un policier et en ont blessé trois autres », a ajouté le porte-parole. « Dix chiites ont été arrêtés, et un grand nombre d’entres eux, blessés. »
Au cours d’une marche interdite par les autorités, les pèlerins devaient se rendre à Zaria, leur fief dans l’Etat de Kaduna (nord), où le mouvement a été totalement banni.
Selon l’AFP, « le nord du Nigeria, où la Charia (loi islamique) est en vigueur, est à immense majorité sunnite et les tensions entre les deux communautés ont déjà fait au moins 10 morts lors de la grande fête de l’Achoura, début octobre, dans différentes villes du nord ouest ».
L’AFP estime que l’hostilité envers les chiites escalade notamment à Kaduna, convertie au salafisme (wahhabisme) , où les imams radicaux ayantfait leur études religieuses en Arabie saoudite n’hésitent plus à faire des prêches haineux contre cette minorité.
Amnesty International a accusé l’armée d’avoir massacré environ 350 musulmans chiites entre le 12 et le 14 décembre 2015 à Zaria, et d’avoir enterré les cadavres dans une fosse commune. Personne dans l’armée n’a à ce jour été jugé ou condamné pour ce massacre.
Le chef de l’IMN, Ibrahim Zakzaky, incarcéré plusieurs fois par le passé, est toujours détenu, sans procès, de même que de nombreux membres de son mouvement. Blessé lors d’un assaut lancé par l’armée conte une procession en 2015, il est partiellement paralysé et a perdu un oeil.
La moitié de la population du Nigeria est musulmane, quasi entièrement sunnite, avec une petite minorité de chiites, selon les chiffres officiels.
Avec AFP