Au début de sa tournée de remerciements pour ses électeurs, le prochain président des Etats-Unis Donald Trump a annoncé jeudi qu’il entendait confier la tête du Pentagone au général à la retraite James Mattis, un militaire au franc-parler surnommé « l’enragé ».
James Mattis était l’un des +finalistes+ pour ce poste crucial de la prochaine administration, alors que Donald Trump a promis d’intensifier la guerre contre les jihadistes du groupe Etat islamique en Syrie et en Irak, deux théâtres d’opérations que le général connaît bien.
« L’enragé, il est excellent », a-t-il annoncé en surprenant les milliers de supporteurs venus le voir à Cincinnati, dans l’Ohio, l’un de ces Etats remportés par le républicain le 8 novembre dernier.
L’enragé (« mad dog ») est le surnom de James Mattis, 66 ans, qui serait le premier ex-général à devenir secrétaire à la Défense depuis 1950. Donald Trump l’avait récemment encensé, se disant notamment « impressionné » positivement par sa position anti-torture.
La future administration Trump comptera donc au moins deux anciens généraux, avec Michael Flynn, nommé conseiller à la sécurité nationale. Une situation inédite, qui risque de faire lever quelques sourcils dans un pays qui, depuis ses origines, a toujours exigé un strict contrôle des militaires par le pouvoir civil.
Le Congrès devra en outre accorder une dispense à l’ex-général Mattis, une loi interdisant en effet aux anciens militaires de devenir secrétaire à la Défense pendant sept ans: une condition qui visait à sanctuariser la direction civile du ministère. Or James Mattis a quitté l’armée en 2013 seulement.
La sénatrice démocrate Kirsten Gillibrand a d’ores et déjà annoncé qu’elle refuserait de faire une exception pour le général Mattis. Mais celui-ci reste populaire auprès des parlementaires américains. C’est « un leader extraordinaire qui suscite l’admiration rare et spéciale de ses troupes », a déclaré le sénateur républicain John McCain.
La méthode Trump
Le meeting de Cincinnati a ainsi pris un tournant inattendu, au grand plaisir de ses électeurs.
« C’est tout lui », sourit Mary Beth Desch, 59 ans, en s’étonnant d’avoir obtenu directement ce « scoop » sur le prochain chef du Pentagone. « Il va tout le temps nous faire des choses comme ça, et c’est pour cela que je l’aime ».
« Nous aurons une dizaine d’étapes, c’est une tournée pour dire merci », a expliqué Donald Trump sur Fox News, dans sa deuxième interview télévisée depuis son élection, alors qu’il n’a toujours donné aucune conférence de presse.
La journée de jeudi était sa première sortie sur le terrain depuis son élection, avec pour objectif d’afficher ses priorités et sa méthode.
Le milliardaire s’est d’abord rendu dans l’Indiana, dans une usine du fabricant de climatisations et d’appareils de chauffage Carrier qu’il s’est targué d’avoir sauvée d’une délocalisation annoncée depuis des mois. Soit 1.100 emplois préservés selon lui.
Au passage, Donald Trump a prévenu que les entreprises américaines qui délocaliseraient pour élaguer leurs coûts de production en subiraient « les conséquences ».
C’est mardi que Carrier avait annoncé renoncer à son projet de délocalisation, une décision facilitée par des aides de sept millions de dollars de l’Etat de l’Indiana, gouverné par le vice-président de Donald Trump, Mike Pence.
Le milliardaire a raconté en détails comment, au cours d’une récente conversation téléphonique improvisée, il avait forcé la main de Gregory Hayes, le PDG de United Technologies, la maison mère de Carier, présent dans la salle.
« Ils disent que ce n’est pas présidentiel d’appeler ainsi les dirigeants d’entreprises géantes. Je pense au contraire que c’est très présidentiel et si ça ne l’est pas, tant pis », a-t-il déclaré.
Mais les opposants démocrates du président élu n’ont pas manqué de s’inquiéter de l’éventuel chantage auquel les patrons américains pourraient se livrer auprès du nouveau pouvoir pour obtenir des aides publiques.
Comme en campagne
Le soir, retrouvant des accents de campagne, Donald Trump a annoncé que le sauvetage de Carrier n’était « que le début », promettant de ramener aux Etats-Unis les près de huit millions d’emplois industriels perdus depuis 2000.
Dans un discours de 52 minutes, le républicain a également réaffirmé ses promesses de construire un mur à la frontière mexicaine, d’abroger « Obamacare » et d’en finir avec l’immigration clandestine.
Mais il a aussi dit vouloir rassembler un « pays très divisé », tendant la main aux démocrates et dénonçant « l’intolérance et les préjugés ».
« Désormais, ce sera l’Amérique d’abord », « Achetez américain, et embauchez américain, ce sera notre mantra », a-t-il déclaré, devant une assistance clairsemée, les fermetures de routes pour raison de sécurité ayant compliqué les accès à la salle de hockey de 17.000 places.
Mais malgré l’ambiance moins électrique, ses partisans ont retrouvé une facette du candidat Trump, qui s’est amusé à faire huer la presse et a raconté en longueur comment il avait déjoué tous les pronostics électoraux.
« On s’est bien amusé contre Hillary, n’est-ce pas? », a-t-il lancé.
Source: AFP