Les dirigeants mondiaux s’efforçaient jeudi de surmonter leurs divisions pour apporter des réponses concertées à la pandémie de Covid-19, dont le bilan devait dépasser les 90.000 morts dans la journée et qui menace la planète d’un désastre économique sans précédent.
Sans mâcher ses mots, la patronne du Fonds monétaire international (FMI), Kristalina Georgieva, a prévenu: cette pandémie aura « les pires conséquences économiques depuis la Grande Dépression » de 1929.
Alors que plus de la moitié de l’humanité est placée en quarantaine, des « secteurs entiers » de l’économie sont à l’arrêt, relève l’Organisation mondiale du commerce (OMC), et un demi-milliard de personnes risquent de tomber dans la pauvreté, selon l’ONG Oxfam.
« Les pauvres n’ont pas de revenus, encore moins d’économies. Mes enfants ne peuvent pas travailler, tout le monde a besoin d’aide », témoigne Maria de Fatima Santos, une habitante de la Cité de Dieu, une favela emblématique de Rio de Janeiro, au Brésil.
Les échanges commerciaux pourraient s’effondrer d’un tiers cette année, s’alarme l’OMC. Et pas moins de 1,25 milliard de travailleurs risquent d’être directement affectés, selon une estimation de l’Organisation internationale du travail (OIT).
Malgré le confinement et un début de normalisation à Wuhan, ville où a débuté la pandémie fin 2019 et dont le bouclage a été levé mercredi, le coronavirus poursuit sa progression. Notamment aux Etats-Unis, où il a fait près de 2.000 morts en 24 heures, un record.
L’ONU, l’Opep et les 27 sur le pont
Dans ce contexte, le Conseil de sécurité de l’ONU veut tenter jeudi de surmonter ses divisions, notamment sino-américaines, lors d’une réunion en visioconférence consacrée au Covid-19.
Selon des diplomates, « les positions évoluent dans le bon sens » et Washington aurait accepté de ne plus insister sur « un virus d’origine chinoise », formulation qui suscitait la fureur de Pékin.
Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres devra toutefois parvenir à unifier une instance divisée entre membres permanents et membres non-permanents.
Il a souligné que ce n’était « pas le moment » des critiques, mais celui de « l’unité » et de la « solidarité pour arrêter ce virus », alors que le président américain Donald Trump a vivement mis en cause l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour sa gestion de la crise.
Marque de la gravité de la situation, la coalition menée par l’Arabie saoudite au Yémen contre la rébellion des Houthis observe depuis jeudi un cessez-le-feu unilatéral pour prévenir une propagation du coronavirus.
Les pays de l’UE doivent pour leur part tenter une nouvelle fois jeudi de s’entendre sur une réponse économique concertée, après l’échec mercredi d’une première réunion marathon.
Dans une tribune, la présidente de la Banque centrale européenne, Christine Lagarde, a appelé les 27 à « être côte à côte » pour répondre à la crise avec des mesures budgétaires.
Mais de profondes divisions opposent notamment les pays du Sud du continent à l’Allemagne et aux Pays-Bas, opposés à toute mutualisation des dettes publiques.
Confrontés à des cours au plus bas en raison de la pandémie, les principaux pays producteurs de pétrole, Opep et Russie en tête, doivent eux aussi tenter de s’entendre dans la journée sur une réduction de production équivalant à 10% du débit mondial.
Le pape sans pieds à laver
Des centaines de millions de chrétiens confinés s’apprêtent de leur côté à célébrer Pâques dans des conditions inédites.
C’est ainsi sans la présence de fidèles que le pape François célèbrera à 16H00 GMT la messe de la Cène, temps fort de l’année liturgique.
Le pape devra à cette occasion s’abstenir du rituel du lavement de pieds, celui-ci ayant été interdit à l’heure du coronavirus qui bannit les contacts rapprochés.
Les autorités de plusieurs pays sont sur le qui-vive pour cette fête qui donne traditionnellement lieu à des réunions de famille. Comme en Irlande, où des barrages routiers ont été mis en place pour éviter toute violation du confinement.
En Espagne, où les processions de la Passion du Christ restent très populaires, les fidèles vivent au rythme des retransmissions des marches des années précédentes.
A Séville, haut lieu des célébrations, des voisins partagent ce moment en mettant le son de ces marches à plein volume peu après 20H00, passé les applaudissements destinés au personnel médical.
« Mon fils aîné de 12 ans met le haut-parleur dans la salle de bains et se douche au son des marches de la Semaine Sainte », s’amuse un habitant, Pablo Murillo.
Vol Soyouz
De leur côté, un astronaute américain et deux cosmonautes russes ont décollé comme prévu jeudi du cosmodrome russe de Baïkonour, au Kazakhstan, en direction de la station orbitale. En raison de la pandémie, les adieux aux familles se sont effectués par visioconférence.
L’Italie reste le pays le plus endeuillé avec 17.669 décès décomptés officiellement, suivie de l’Espagne (15.238 morts), des Etats-Unis (14.817) et de la France (10.869).
En Grande-Bretagne, un nouveau plafond de 938 morts a été recensé en 24 heures, pour plus de 7.000 en tout. La santé du Premier ministre Boris Johnson, en soins intensifs depuis dimanche à Londres après avoir été contaminé au Covid-19, « continue de s’améliorer » selon Downing Street.
L’OMS a mis en garde contre toute tentation d’assouplir précocement le confinement alors que l’Espagne, l’Italie et la France relèvent une tendance à la baisse de la tension hospitalière.
Des pays comme l’Autriche, le Danemark, la Norvège, la Grèce et la République tchèque, jugeant la pandémie sous contrôle sur leurs territoires, ont annoncé la levée prochaine de certaines restrictions.
Source: AFP