Caracas veut les juger, Washington les rapatrier: le sort des deux Américains arrêtés au Venezuela pour avoir tenté d’envahir le pays est au centre d’une joute entre l’administration Trump et Nicolas Maduro.
Luke Denman, 34 ans, et Airan Berry, 41 ans, ont été arrêtés lundi et ils « ont été inculpés et ont avoué » avoir organisé cette tentative d’invasion déjouée la veille, a déclaré Nicolas Maduro lors d’une conférence de presse.
Les deux hommes, a-t-il poursuivi, « font l’objet de poursuites lancées par le parquet général de la République ».
« Ils sont bien traités », a assuré le dirigeant socialiste et « leur procès se déroulera avec les pleines garanties et de façon juste ».
Un peu plus tôt, le secrétaire d’Etat américain, Mike Pompeo, avait affirmé que Washington ferait tout pour rapatrier Luke Denman et Airan Berry, deux anciens membres des forces spéciales américaines.
« Il n’y a aucune implication directe du gouvernement américain dans cette opération », avait-il de nouveau prétendu.
Mais Moscou, allié traditionnel de Nicolas Maduro, a jugé « pas convaincante » l’affirmation de Washington « selon laquelle le gouvernement américain n’a rien à voir avec ce qui s’est passé au Venezuela » ces derniers jours.
Pour Nicolas Maduro, il ne fait aucun doute que Donald Trump a « dirigé directement » cette « invasion » tuée dans l’oeuf dimanche sur la côte caribéenne et qui a tout d’une « Baie des Cochons » vénézuélienne.
« C’est un +remake+ » de l’opération ratée montée par des exilés cubains et la CIA en 1961 pour renverser Fidel Castro, a tonné Nicolas Maduro.
L’administration Trump tente à tout prix d’évincer Nicolas Maduro auquel elle nie toute légitimité, estimant, comme près d’une soixantaine de ses alliés, que l’opposant Juan Guaido est le président par intérim du Venezuela.
Washington serre de plus en plus fort la vis des sanctions et la justice américaine a inculpé l’héritier politique de Hugo Chavez (1999-2013) pour « narco-terrorisme » en mars. Nicolas Maduro, au pouvoir depuis 2013, jouit du soutien de Cuba, de la Chine et de la Russie.
A l’origine de cette nouvelle poussée de fièvre entre Caracas et Washington, une tentative d’invasion par la mer de mercenaires venant de Colombie, que l’armée et la police sont parvenues à stopper dimanche matin sur la plage de Macuto, à moins d’une heure de route au nord de la capitale vénézuélienne.
Denman et Berry ont été arrêtés le lendemain dans le village côtier de Chuao, à 80 km à l’ouest de Caracas.
Selon les autorités vénézuéliennes, huit « terroristes » ont été tués dans l’opération dimanche et une vingtaine de personnes arrêtées.
La diplomatie américaine estime quant à elle que ce « mélodrame » pourrait faire partie d’une « campagne de désinformation majeure » menée par Caracas.
Faux, a rétorqué Nicolas Maduro. L’instigateur de cette invasion, affirme-t-il, est bel et bien Donald Trump et le contrat avec les mercenaires a été commandité par le département d’Etat.
Et le président vénézuélien de montrer la vidéo d’un interrogatoire de Luke Denman dans laquelle le jeune homme explique avoir été engagé par un ancien soldat de l’armée américaine, Jordan Goudreau, fondateur d’une société privée de sécurité appelée Silvercorp USA, pour envahir le Venezuela et renverser Nicolas Maduro.
Lorsque l’enquêteur lui demande — en anglais — qui est à l’origine de cette opération, Luke Denman répond qu’il s’agit de Donald Trump.
Selon des éléments biographiques obtenus par l’AFP auprès du Pentagone, Luke Denman a fait partie des forces spéciales américaines et sa carrière au sein de l’armée a duré de 2006 à 2011. Jordan Goudreau est resté sous les drapeaux de 2001 à 2016 au sein des forces spéciales et il a été déployé en Irak et en Afghanistan.
Enfin, Airan Berry, ex-membre des forces spéciales lui aussi, a effectué sa carrière militaire de 1996 à 2013.
Nicolas Maduro et la justice vénézuélienne accusent Juan Guaido d’avoir recruté des « mercenaires » avec les fonds bloqués par des sanctions américaines pour fomenter cette opération avec Jordan Goudreau.
Washington a prévenu par le passé qu’une éventuelle interpellation de Juan Guaido serait l' »ultime erreur » de Nicolas Maduro.
Source: Avec AFP