Alors que les tensions continuent de monter entre Pékin et Washington, aussi bien dans le cadre économique, politico-diplomatique que militaire, il semble que l’establishment étasunien soit résolu à poursuivre jusqu’au bout sa campagne anti-chinoise, en faisant en sorte d’y intégrer ses alliés occidentaux.
Après la guerre commerciale lancée contre Pékin, les pressions sur les médias chinois aux USA, les provocations militaires en mer de Chine, Washington ne compte toujours pas s’arrêter. Le dernier épisode en date: la demande unilatérale étasunienne de fermer le Consulat général de Chine dans la ville US de Houston. Dans cet épisode aussi, le leadership chinois ne prévoit pas de reculer et tenter d’appeler les Etats-Unis à la raison, à défaut de quoi il se prépare à des représailles.
Se sentant probablement de plus en plus isolée sur la scène internationale, y compris dans cet acharnement contre la République populaire de Chine, l’élite étasunienne tente de mettre en œuvre sa coalition internationale contre Pékin. Pour cela, elle pourra vraisemblablement compter sur son principal allié d’Europe occidentale en la qualité du Royaume-Uni – formant ensemble le noyau dur du monde anglo-saxon par la même occasion.
Mais Washington a-t-il réellement des chances de faire joindre à ce projet un nombre conséquent de pays? Rien n’est moins sûr. Certes, l’élite étasunienne pourra éventuellement compter sur quelques alliés fidèles au sein des pays membres de l’Union européenne – se tenant prêts à soutenir pratiquement tout ordre émanant d’Outre-Atlantique. Pologne, pays baltes, Roumanie,… Mais même réunis, il sera impossible de parler d’une coalition digne de ce nom, tellement ces derniers ne représentent pas des puissances souveraines sur l’arène internationale. Tout en sachant que la Chine, première économie mondiale en termes de PIB à parité de pouvoir d’achat (PPA), pourra faire mal économiquement parlant à toutes les forces hostiles.
Le reste de l’Europe bruxelloise sera-t-il prêt à suivre les USA dans leur campagne anti-Chine? Beaucoup de doutes planent à ce niveau. Y compris même au niveau des représentants ouvertement pro-atlantistes, notamment l’allemande Angela Merkel – au moment même où les Etats-Unis menacent ouvertement d’adopter des sanctions contre les compagnies et personnalités allemandes qui participent au projet du gazoduc Nord Stream 2. Evidemment, le désaccord allemand dans ce dernier dossier n’est pas dû à un amour quelconque de Berlin vis-à-vis de Moscou, mais au simple pragmatisme économique – en passant tellement caractéristique de ce pays.
La France, qui possède des intérêts économiques importants en Chine, a également peu de chances de rentrer dans le club résolument anti-chinois de Washington. Et pourra tout au plus se limiter à une solidarité de principe vis-à-vis de l’allié étasunien. Ceci étant dit, même dans la perspective (peu probable) d’une solidarité totale des pays de l’UE vis-à-vis des Etats-Unis contre Pékin, il est à se demander qui en sera le grand perdant? Et peu probable que ce soit la Chine.
Aujourd’hui, les intérêts, notamment économico-commerciaux, de l’Empire du Milieu se trouvent pratiquement dans toutes les contrées du monde. Avec un accent particulier en Eurasie et en Afrique. Les puissances du grand espace eurasien, ainsi que leurs alliés, sans douter une seule seconde soutiendront la Chine face à l’acharnement étasunien. Les pays africains, du moins la grande majorité, ne se joindront pas eux aussi à l’axe tellement voulu par l’establishment US. Pas plus qu’une large partie de l’Amérique latine, ni du Moyen-Orient.
Et là nous revenons une fois de plus au sujet phare dans le cadre du monde contemporain. Qui représente réellement la communauté internationale? Un espace ne dépassant pas 10% de la population terrestre, voire 15% en y intégrant tous les satellites? Ou le reste de l’humanité ne faisant pas partie du monde occidental? Les chiffres parlent une fois de plus d’eux-mêmes. Cela sans oublier, là aussi une fois encore, qu’une part notable des citoyens des pays occidentaux n’approuve guère la politique de leurs gouvernements respectifs, pas plus que la détermination de ces derniers à forcer le monde vers un retour à l’ère unipolaire. Un retour qui n’aura pas lieu.
Par Mikhail Gamandiy-Egorov
Source : Observateur continental