Le projet du « Nouveau Levant », que le Premier ministre irakien a proposé juste après son retour de Washington, suscite pas mal de questions concernant ses objectifs.
À ce propos, Abdel Bari Atwan, le rédacteur en chef du quotidien panarabe en ligne Rai al-Youm écrit: « Dans la conjoncture où les pays arabes, voire la Ligue arabe même, chancèlent, le Premier ministre irakien propose l’idée d’un « Nouveau Levant » qui inclurait l’Égypte, en tant que bloc démographique, l’Irak, en tant que bloc pétrolier et la Jordanie qui servirait d’un pont entre ces deux pays, due à sa situation géographique. »
À noter que le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi, le roi Abdallah II de Jordanie et le Premier ministre irakien Moustafa al-Kazemi se sont retrouvés, mardi 25 août, à Amman où ils ont participé au 3ème Sommet tripartite Égypte-Jordanie-Irak.
Abdel Bari Atwan a continué : « Les fondements politique, idéologique et économique de ce projet du « Nouveau Levant » restent toujours inconnus. On ne sait pas non plus pourquoi ce projet a été mis en avant si rapidement et imprévisiblement. Là, il existe quelques points qui méritent de l’attention. »
1- Le projet du « Nouveau Levant » a été annoncé par son parrain, M. al-Kazemi, après sa visite à Washington où il a été chaleureusement accueilli par Donald Trump et son secrétaire d’État, Mike Pompeo.
2- Les trois pays étant noyau de ce nouveau bloc sont unis par une idéologie unique qui est qualifiée de « modération », soutenue par les États-Unis. En plus, deux de ces trois États (l’Égypte et la Jordanie) ont déjà signé des accords de paix avec le régime occupant israélien. Reste à savoir si le rapprochement de l’Irak à ces deux pays balisera le terrain à ce que Bagdad, lui aussi, signe un accord de paix avec Israël, d’autant plus que le Premier ministre irakien a récemment qualifié, implicitement, de « souveraine » la décision des Émirats arabes unis de normaliser leurs relations avec Israël.
3- Ce nouveau bloc régional nous rappelle le bloc quartette que Saddam Hussein avait mis en place avant l’invasion du Koweït, comprenant l’Égypte, la Jordanie, le Yémen et l’Irak. L’alliance n’a pourtant pas fait long feu en raison des différends personnels et politique entre les présidents irakien et égyptien de l’époque.
4- Le « Nouveau Levant » ne comprend pas étonnamment la Syrie, pays qui porte, historiquement parlant, le nom du Levant. En plus, la Syrie est une importante voisine de la Jordanie et de l’Irak ainsi qu’un allié historique de l’Égypte et de l’Irak. Tous ces facteurs rendent de plus en plus étrange l’absence de Damas parmi les composants du nouveau bloc.
5- La nouvelle alliance, qui serait probablement censée remplacer le Conseil de coopération du golfe Persique, n’aurait-elle pas pour mission de neutraliser l’Iran et la Turquie, en tant que deux puissances régionales, et de rendre le terrain propice à la réalisation d’un troisième projet arabe, sous l’égide des États-Unis ?
Dans ce droit fil, Mazan al-Achiqar, économiste irakien, a déclaré que le nouveau projet de Mustafa al-Kazemi laissait prévoir un virage de l’Irak vers les États-Unis, les monarchies arabes du golfe Persique et l’Égypte et la Jordanie, au grand dam des accords de coopération que l’ancien Premier ministre irakien, Adel Abdel Mahdi, avait signés avec la Chine, en 2019.
Source: Avec PressTV