Alors que la bataille fait rage dans la province d’Idleb entre le front al-Nosra, branche d’Al-Qaïda en Syrie rebaptisée front Fateh al-Sham, et son ancien allié Ahrar al-Sham, la distribution des milices a connu de nouvelles restructurations.
Ces dernières heures, de nouvelles factions terroristes ont rejoint les rangs du Nosra : le mouvement Noureddine al-Zenki, pourtant très admis par les Occidentaux malgré ses exactions sanguinaires, Liwa al-Haq, Front Ansar al-Din et Jaïch al-Sounna. Ils s’ajoutent à Jound al-Aqsa qui a été le premier à afficher son soutien au Nosra.
Par dissolution et fusion
Mais cette fois-ci cette coalition a procédé d’une façon différentes des précédentes: par dissolution et fusion.
Elles ont toutes annoncé leur dissolution et leur fusion au sein d’un seule groupe baptisé Tahrir al-Cham (libération du Levant, en arabe) (à gauche).
Selon la chaine de télévision arabophone al-Alam, Jaïch al-Sounna a démenti avoir rejoint les rangs de qui que ce soit. Mais certains activistes ont fait part de divisions au sein de cette milice.
Ces factions n’avaient pas participé aux négociations de paix à Astana avec le pouvoir en début de semaine sous le parrainage de la Russie, de l’Iran et de la Turquie, contrairement aux autres groupes rebelles. Ces derniers ont été accusés par le front al-Nosra d’avoir conclu un accord pour le combattre et « l’isoler »
Dès la fin des négociations mardi, la milice d’al-Qaïda a attaqué une base d’une milice dans la province d’Idleb et les combats se sont propagés dans cette région ainsi que dans celle voisine d’Alep.
En même temps, cinq factions se démarquaient du Nosra et rejoignaient les rangs du mouvement Ahrar al-Cham, le plus puissant des groupes insurgés. Celui-ci avait évité de participer à la rencontre d’Astana, par mesure de précaution, pour ne pas offusquer le Nosra, où susciter ses doutes.
Mohaycini toujours avec al-Qaïda
« Deux blocs rivaux sont ainsi en train d’émerger: l’un emmené par Ahrar al-Cham, l’autre conduit par Fateh al-Cham », constate l’AFP, rappelant que ces deux groupes étaient encore récemment alliés au sein d’une alliance surnommée Armée de la conquête (Jaïsh al-Fateh), qui combattait l’armée syrienne et le pouvoir central dans les provinces d’Idleb (nord-ouest) et d’Alep (nord).
« Vu les complots qui secouent la révolution syrienne et la guerre interne (entre factions) et par souci d’unité, nous annonçons la dissolution des groupes suivants et leur fusion dans une nouvelle entité sous le nom ‘Tahrir al-Cham' », indique le communiqué.
Selon le média russe Russia Today, le guide spirituel du front al-Nosra, le religieux saoudien Abdallah al-Moyacini et 5 autres prédicateurs salafistes wahhabites, Abdel Razzak al-Mahdi, Abou Youssef al-Hamwi, Abou al-Taher al-Hamwi, et Mosleh al-Eliani , ont annoncé avoir rejoint la coalition « Tahrir al-Cham » et appelé toutes les factions militaires à de même.
Le commandant de Tahrir al-Sham
Tahrir al-Sham sera dirigé par un ancien d’Al-Qaïda et d’Ahrar al-Sham nommé Abou Jaber Hachem al-Sheikh, indique Média de guerre, instance médiatique de la résistance qui dispose d’une antenne en Syrie.
Né en 1968 dans la ville de Maskanat dans la province Est d’Alep, et diplômé en génie mécanique, il a combattu avec Al-Qaïda en Irak, sous le commandement d’Abou Moussaab al-Zarqaoui. Entre 2003 et 2005 il était chargé de faire passer les combattants de la Syrie vers l’Irak. Arrêté en 2005 en Syrie, il a été condamné à 8 années de prison, avant d’être libérée dans le cadre d’une amnistie présidentielle décrétée en 2011.
Il a alors fondé dans sa ville natale une milice pour combattre l’Etat syrien, qu’il a baptisée Moussaab Ben Omaïr. Celle-ci a rejoint dans un premier moment le mouvement Fajr al-Sham, avant de finir chez Ahrar al-Sham, lors de la prise de l’aéroport militaire Al-Jarrah.
Dès lors, Abou Jaber y a été désigné comme membre dans son conseil consultatif Chourah. Ensuite, il est devenu le prince du secteur oriental, puis celui de la province d’Alep après l’assassinat du fondateur d’Ahrar al-Sham, Abou Khaled al-Souri, un ancien d’Al-Qaïda qui a connu Oussama Ben Laden.
C’est lui finalement qui a pris le commandement militaire de cette milice en 2014, après l’attentat qui a coûté la vie à 45 de ses responsables, dont son commandant général Hassane Aabboud.
Avec quelques uns des dirigeants des Ahrar al-Sham, Abou Jaber conduisait la branche pro Al-Qaïda dans la milice d’Ahrar al-Sham et a toujours rejeté les choix de la nouvelle direction politique, et surtout celle son responsable Labib al-Nahhas, qui en appelait à un rapprochement avec l’Occident.
Il est aussi connu pour avoir été l’un des premiers à combattre Daesh vers la fin de 2013. A cette époque, il en avait voulu à la direction religieuse d’Ahrar al-Sham qui a refusé de promulguer un décret religieux pour combattre Daesh avec pour motif que ce dernier a pour slogan l’unicité divine.
Lui et ses compagnons ont désormais quitté Ahrar al-Sham pour revenir la où ils doivent être naturellement chez le front al-Nosra.
Une simple métamorphose
Des observateurs de la scène syrienne ont constaté que de nombreux combattants d’Al-Qaïda ont soit fondé des milices qui semblent disctinctes d’Al-Qaïda, ou se sont disséminés dans les différentes milices syriennes. Selon eux, le but essentiel n’est autre que de se camoufler pour éviter les mesures applicables sur Al-Qaïda.
Un autre moyen plus courant a été utilisé en Syrie à cette fin, le changement d’appellation de leur milice. Cela a été le cas en passant du front al-Nosra, au front Fateh al-Sham, et l’est aussi pour la nouvelle appellation, Tahrir al-Sham.
Loin d’une mutation structurelle, il s’agit tout bêtement d’une métamorphose, un changement de peau.
Source: Divers