Commençons par le fait que la Russie tire chaque jour 4 à 5 fois plus d’obus d’artillerie que l’Ukraine : « La Russie tire 20 000 obus d’artillerie par jour, a estimé un haut responsable américain de la défense, tandis que l’Ukraine tire de 4000 à 7000 coups par jour.
Les Ukrainiens épuisent rapidement leurs stocks d’obus d’artillerie et d’autres munitions, y compris pour leurs systèmes de défense aérienne, ont déclaré des responsables. »
Alors, comment cela se passe-t-il ? Pour commencer, l’Ukraine épuise ses stocks et les États-Unis et l’OTAN ne disposent pas de la base industrielle nécessaire pour produire de nouvelles fournitures afin de répondre aux besoins des Ukrainiens et de reconstituer leurs propres stocks.
« Nous apprenons aujourd’hui que les obusiers fournis par les États-Unis ne sont pas très robustes : La guerre en Ukraine connaît un taux de bombardement d’artillerie jamais vu dans une guerre depuis la guerre de Corée. Cette intensité est si élevée qu’elle met à rude épreuve les pièces d’artillerie elles-mêmes, un tiers d’entre elles étant hors service à tout moment ». C’est ce qu’affirme le New York Times, qui rapporte qu’une grande partie des quelque 350 obusiers fournis par les pays occidentaux à l’Ukraine – dont 142 obusiers M777 américains – sont endommagés, détruits ou simplement en panne en raison d’une utilisation excessive.
Citant plusieurs responsables de la défense américaine, le rapport indique que l’utilisation répétée use les canons. Les pièces d’artillerie doivent être mises hors service et envoyées dans un centre de réparation situé en dehors de l’Ukraine. »
Compte tenu de la cadence de tir bien plus élevée des pièces d’artillerie russes, la logique voudrait que la Russie rencontre le même problème. Ce n’est pas le cas. Cela peut s’expliquer en partie par le fait que la Russie possède beaucoup plus de pièces d’artillerie que l’Ukraine et que ces systèmes ne sont pas sollicités au même degré que les pièces ukrainiennes. Il est également possible que les Russes produisent des pièces d’artillerie supérieures, capables de résister aux contraintes de tirs multiples.
Je pense que l’une des causes des mauvaises performances des pièces d’artillerie produites aux États-Unis est une conséquence du processus d’acquisition de la défense américaine.
Au cours des 40 dernières années, les États-Unis n’ont pas eu à combattre un adversaire qui pouvait riposter avec des cadences de tir comparables. Par conséquent, la norme de performance spécifiée dans la demande de proposition soumise aux entrepreneurs de la défense américains n’envisageait pas la cadence de tir que les pièces d’artillerie effectuent quotidiennement en Ukraine. Les entrepreneurs de la défense ont produit une pièce d’artillerie qui répondait à la norme minimale. Il semblerait que la pièce d’artillerie de 155 mm n’était pas tenue de fonctionner à un niveau maximal.
Comme je l’ai noté dans un précédent article, ce n’est pas parce que les États-Unis achètent des armes coûteuses et dépensent des milliards de plus que la Russie que ces armes sont qualitativement meilleures. Le système politique américain incite le ministère américain de la défense à produire des armes coûteuses tant que les systèmes approuvés par le Congrès apportent des avantages économiques tangibles aux électeurs de ces membres du Congrès. Les contributions financières de ces entreprises de défense aux membres du Congrès constituent un lubrifiant pour obtenir la production de programmes qui peuvent ne pas avoir de sens tactique sur le champ de bataille. Le coûteux chasseur F-35 en est un exemple frappant.
Si l’Ukraine ne parvient pas à maintenir son niveau de combat actuel sur le front, elle sera obligée de battre en retraite. L’artillerie est l’une des rares armes qui a permis à l’Ukraine de rester dans le combat. L’Ukraine ne dispose d’aucune puissance aérienne – c’est-à-dire de chasseurs de combat à voilure fixe et d’hélicoptères – pour fournir un soutien aérien rapproché et son approvisionnement en chars de combat diminue chaque jour.
La situation de l’Ukraine est d’autant plus grave que ni les États-Unis ni l’OTAN ne disposent d’une quantité suffisante de nouveaux obusiers à envoyer à Kiev. Ne voyez pas l’Amérique comme un gentil et généreux Oncle Sam. Je pense que la vieille Mother Hubbard (d’une vieille comptine anglaise – NDT) est une comparaison plus appropriée. L’armoire est vide.
Sources : A Son of the New American Revolution ; traduction Avic – Réseau International