Oweidat contre Bitar, c’est entre ces deux juges que se déroule la bataille juridique livrée ces deux derniers jours faisant craindre l’explosion du pouvoir judiciaire au Liban. Une crise qui risque d’exacerber la crise politique découlant de la vacance présidentielle et la crise financière marquée par l’envolée du dollar face à la livre libanaise. Il a passé ce mercredi le cap des 57000 LL.
Dans l’après-midi de ce mercredi 25 janvier, les développements judiciaires se sont accélérés dans le dossier de l’explosion du port de Beyrouth survenu le 4 août 2020.
Libération de tous les détenus
Le procureur général de cassation le juge Ghassan Oweidat a ordonné la libération de la totalité des personnes arrêtées depuis 2020 dans le cadre de l’enquête sur l’explosion du port de Beyrouth, sans exception, les interdisant de voyage, et les mettant à la disposition du Conseil juridique.
La veille, le juge d’instruction suspendu Tareq Al-Bitar avait décidé de reprendre unilatéralement l’instruction, avec l’appui manifeste des Occidentaux, français et américain en particulier, malgré sa suspension depuis plus d’un an, décrétant la libération de 5 personnes.
Le correspondant d’Al-Manar a rapporté que la décision du juge Oweidat de libérer les 17 personnes, pour la plupart des fonctionnaires de rang inférieur ou intermédiaire, a été strictement appliquée.
Badri Daher, qui dirigeait l’autorité douanière au moment de l’explosion et était le plus haut fonctionnaire détenu à la suite de l’explosion, a été libéré mercredi, a déclaré sa sœur de Daher à Reuters. (Photo à gauche)
Selon des sources d’al-Manar, cette mesure prise par Oweidat ne sera pas la seule, et sur la base de la loi qui restreint les activités de Bitar, d’autres décisions seront prises.
Bitar inculpé à son tour et interdit de voyage
En riposte à l’inculpation prononcée par le juge suspendu Bitar contre 8 personnes, dont le chef de la Sûreté générale le générale Abbas Ibrahim et contre le juge Oweidat, ce dernier a porté plainte contre lui devant l’Assemblée générale du Tribunal de cassation, pour « abus de pouvoir », et pour avoir provoqué une rupture dans le système judiciaire.
Il a aussi émis contre lui un mandat d’arrêt et d’interdiction de voyage, qui a été distribué à la Sûreté générale.
Dans un échange de SMS avec Reuters, Oweidat a déclaré qu’il avait convoqué Bitar pour un interrogatoire mais n’a pas précisé s’il l’avait inculpé.
Bitar qui a dit avoir été inculpé, sans donner de détails, a déclaré à Reuters qu’il poursuivrait son enquête malgré une résistance croissante, « jusqu’à ce que j’émette un acte d’accusation”. Selon lui, Oweidat « n’a pas le droit » de déposer l’accusation ou de libérer les détenus.
Le Hezbollah salue Oweidat. Et le CPL…
Dans les réactions des partis politiques à la démarche du juge Oweidat, force est de constater que le Hezbollah l’a saluée.
Par la voix du député de son bloc parlementaire « Fidélité à la résistance » Ibrahim Moussaoui qui a tweeté : «Les décisions du juge Ghassan Oweidat sont un pas dans la bonne voie pour restaurer la confiance dans les juges et le système judiciaire après sa destruction par certains membres de la maison judiciaire ! »
Le Courant patriotique libre a lui aussi exprimé un avis favorable à la démarche du juge Oweidat, surtout à la libération des tous les arrêtés dans ce dossier.
« Il est juste de libérer les personnes injustement arrêtées, mais ce n’est pas suffisant. L’essentiel reste à faire : révéler la vérité sur l’explosion du port, pour rendre justice aux familles des victimes et panser leurs blessures », a écrit son chef Gebrane Bassil sur sa page Twitter.
Et d’ajouter : « En plus, il faut dévoiler les auteurs du vol de l’argent des Libanais et les tenir pour responsables. La vérité doit prévaloir ».
Une réunion décisive du Conseil supérieur de la magistrature
Selon les informations d’al-Manar, une réunion du Conseil supérieur de la magistrature se tiendra demain à 13H, et des décisions importantes seront rendues.
Le président du Conseil supérieur de la magistrature, le juge Souhail Abboud, a tenu une réunion avec le ministre de la Justice au cours de laquelle il y a eu des divergences d’opinion, selon le correspondant d’Al-Manar. Le journal al-Akhbar avait indiqué dans son édition du 24 janvier que la démarche du juge Bitar de relancer l’instruction a été planifiée de concert avec le juge Abboud, lequel avait subi des pressions occidentales pour l’empêcher de le remplacer.
De la folie à la folie. Vers où les USA nous entrainent-ils?
En fin de cette journée qui s’isncrira sans doute dans les annales de l’histoire du Liban, l’ex-député Najah Wakim a résumé sur Twitter : « De la folie du dollar, à la folie des prix et la folie de la Justice, vers où les États-Unis nous entrainent-ils. Dans le monde entier, là où la main américaine agit, elle est souillée par le sang et la désolation et les destructions s’installent. Soyez prudents ».
Source: Divers