Ryad a violemment critiqué le président libanais Michel Aoun. Pour le moment indirectement.
Dans les médias saoudiens lesquels observent à la lettre la ligne politique dictée par le régime, il est devenu « le boucher », un homme « aux multiples références qui ne cessent de changer son fusil d’épaule».
C’est du moins les qualificatifs que lui attribue le quotidien saoudien proche du régime Oukaz. Celui-ci reproche au numéro un libanais d’avoir soutenu le ministre libanais des Affaires étrangères Joubrane Bassil qualifié quant à lui de « menteur ».
Au lendemain du sommet de Ryad auquel a participé le chef de la diplomatie libanaise, celui-ci a révélé que la délégation libanaise n’était pas au courant qu’un communiqué allait être publié au terme de la rencontre et que ses responsables avaient même nié l’éventualité qu’il y en aurait. Ce qui laisse supposer que les Saoudiens ont dupé les participants à cette rencontre dans laquelle le président américain était présent.
« C’est un homme est fragile mais fourbe. Son parcours militaire s’est toujours basé sur la présence d’un garant à ses côtés », a aussi écrit le journal, qui raconte aussi : « C’est l’ex- commandant de l’armée qui a fait entrer l’armée syrienne au palais de Baabda ».
Dans les années 80 et 90, le général Michel Aoun était violemment hostile à la présence syrienne au Liban. En 1988, étant alors chef de l’armée libanaise, il a été désigné par le président libanais sortant Amine Gemayel comme Premier ministre par intérim, et a lancé la bataille de libération du Liban.
« Des combats sanguinaires ont eu lieu entre les communautés entre 1988 et 1990, et Aoun était l’un de ses bourreaux », a décrit le journal saoudien. Et de s’interroger : « l’homme a-t-il changé depuis qu’il est devenu président ? »
A noter que l’Arabie saoudite a elle aussi sa part dans les combats fratricides qui ont entaché la guerre civile libanaise entre 1975 et 1990.
Selon le journal libanais al-Akhbar, la campagne menée par l’Arabie contre le président libanais n’est pas seulement due au soutien qu’il affiché pour Bassil. Elle est surtout motivée par ses positions exprimées à plusieurs reprises de soutien à la résistance. Ce qui est certes dans le prolongement de la ligne politique adopté par son parti le Courant patriotique libre durant la décennie qui s’est écoulée.
Mais c’est dernièrement le discours du secrétaire général du Hezbollah Sayed Hassan Nasrallah dans lequel il a violemment critiqué la duperie de Ryad sur cette déclaration qui a mis les Saoudiens hors d’eux.
« Les saoudiens ont fondé leurs espoirs sur une séparation entre les positions du président de la république, quel qu’il soit, et les déclarations du Hezbollah, surtout après que Aoun s’en est personnellement porté garant », a expliqué une source informée pour le quotidien libanais. Accusant le président libanais d’avoir avoir à ses engagements qu’il a donnés aux Saoudiens, lors de sa visite à Ryad, d’empêcher toute atteinte aux pays du Golfe.
Ce que démentent les milieux proches du chef de l’Etat libanais, selon lesquels M. Aoun n’a pas changé sa politique qui est en parfaite harmonie avec son discours d’investiture et avec la Déclaration ministérielle du gouvernement libanais.
« Il veille à des meilleures relations avec les Etats arabes, et rappelle souvent le traité de la Ligue arabe qui en appelle à la non ingérence dans les affaires des pays arabes », un rappel adressé sans doute aux saoudiens, lesquels semblent vouloir que le Liban interdise les positions hostiles au royaume wahhabite. Celles du Hezbollah en tête.
Il est clair que Ryad en veut au président libanais sa ligne politique qui se veut indépendante de ses interférences.
Alors qu’elle s’est autoproclamée leader du monde arabe et islamique, elle fait de plus en plus preuve d’une susceptibilité maladive, qui ne supporte aucune contestation, ni aucune opposition.