L’Inde a haussé le ton vendredi pour dénoncer comme une atteinte à sa « sécurité » la construction d’une route militaire chinoise sur un plateau montagneux stratégique au centre de tensions ces temps-ci entre l’Inde, la Chine et le Bhoutan.
Les deux géants asiatiques et le minuscule Bhoutan sont dans une confrontation autour du chantier d’une route entrepris par l’armée chinoise sur le plateau de Doklam.
Pékin considère cette zone comme lui appartenant quand Thimphou, qui la revendique également, soutient que la question de la souveraineté doit encore être réglée.
Située sur le flanc ouest du Bhoutan et à l’est de l’Etat indien du Sikkim, la vallée tibétaine de Chumbi – où se situe le Doklam, appelé Donglang par la Chine – fait la jonction entre les territoires indien, chinois et bhoutanais.
« Le 16 juin, une équipe de construction de l’APL (armée populaire de libération, ndlr) a pénétré dans la zone de Doklam et essayé de construire une route », a déclaré New Delhi, qu’inquiète ce développement d’infrastructures militaires.
« Une telle construction représenterait un changement significatif du statu quo avec de sérieuses implications pour la sécurité de l’Inde », a dénoncé le ministère indien des Affaires étrangères dans un communiqué.
La vallée de Chumbi est stratégiquement sensible pour l’Inde. Elle n’est située qu’à quelques dizaines de kilomètres du corridor de Siliguri, une étroite bande de terre surnommée « cou de poulet » qui est la seule jonction territoriale pour New Delhi entre les plaines du nord et ses Etats du nord-est.
Le chef de l’armée indienne, Bipi Rawat, s’est rendu jeudi au Sikkim pour évaluer la situation.
‘Incursion’
En début de semaine, la Chine avait la première donné de la voix.
Elle avait protesté contre une « incursion » de militaires indiens sur ce qu’elle considère comme son territoire historique pour empêcher le bon déroulement des travaux.
L’armée indienne « a unilatéralement provoqué des tensions » et l’incident « menace gravement la paix et la stabilité des zones frontalières », avait ainsi estimé le ministère chinois de la Défense dans un communiqué.
New Delhi, qui ne s’était pas encore exprimé officiellement sur ce sujet, a confirmé vendredi une « approche » des équipes du chantier par des soldats indiens, en coordination avec les autorités bhoutanaises, pour appeler à l’arrêt des travaux.
Le Bhoutan et la Chine n’entretiennent pas de relations diplomatiques officielles et dialoguent généralement via l’Inde, qui agit comme le parrain du petit royaume himalayen sur la scène internationale.
Ce dernier avait de son côté qualifié ces activités de « violation » d’un accord avec la Chine stipulant que « dans l’attente de la résolution de la question des frontières, la paix et la tranquillité seront maintenues ».
L’Inde et la Chine ont deux contentieux territoriaux majeurs.
Paradoxalement, le secteur du Sikkim n’en fait pas partie et est l’objet d’un certain consensus.
Dans le nord, au niveau du Ladakh, l’Inde revendique la région de l’Aksaï Chin contrôlée par le Chine. A l’est, Pékin ne reconnaît pas la souveraineté de l’Inde sur l’Arunachal Pradesh car elle le considère comme une partie du Sud-Tibet.
L’Inde et la Chine se sont affrontés dans une guerre-éclair en 1962 qui avait vu les soldats indiens humiliés par les troupes chinoises.
Source: AFP