À Idlib, la Turquie a fini par presque capituler vu les évolutions qui s’y sont récemment produites : un retour à l’accord d’Adana n’est pas tellement au détriment des Kurdes syriens; et les groupes armés, sur lesquels Ankara comptait, ont été tous anéantis par un Front al-Nosra qui ne veut plus du soutien des Turcs et qui préfère même un dialogue direct avec Damas.
À ce propos, Saadollah Zareï, expert iranien des questions politiques, a fait paraître, le jeudi 31 janvier, un article dont vous allez lire une partie.
« Après avoir pris part à deux tours de négociations à Moscou en espérant trouver une formule qui lui permette d’attaquer en même temps les Kurdes et les terroristes de Daech, la Turquie s’est heurtée à la position ferme de la Russie et de l’Iran. Là, Moscou a proposé à Ankara de revenir à l’accord d’Adana, signé le 20 octobre 1998 à Adana entre la Syrie et la Turquie. L’accord d’Adana engage les autorités syriennes à lutter contre le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) sur leur territoire pour ainsi les empêcher de porter atteinte au sol turc. En échange, les responsables turcs ont promis de ne pas violer la souveraineté de la Syrie dans les régions au peuplement kurde et de ne pas étendre leur chasse aux Kurdes armés à moins de cinq kilomètres au nord de la Syrie.
Si la Turquie tient sa promesse sur un retour à l’accord d’Adana, le gouvernement et la nation de la Syrie jouiront d’une importante victoire sans tracas. D’où l’accueil à bras ouvert des autorités syriennes aux déclarations du ministre turc des Affaires étrangères Mevlüt Çavusoglu qui avait donné son feu vert à l’initiative russe. Contrairement à son apparence anti-kurde, la remise en vigueur de l’accord d’Adana ne nuit nullement aux Kurdes syriens, au moins dans la conjoncture actuelle, car si l’armée turque cesse de provoquer les Kurdes, ces derniers ne se donneront pas la peine de s’engager dans des affrontements avec les forces turques à une profondeur de plus de cinq kilomètres du Nord syrien.
Par ailleurs, plusieurs rapports font part des contacts entre les services de sécurité turc et syrien qui négocient depuis un certain temps la réouverture de l’ambassade turque à Damas, ce qui met en évidence un changement de cap d’Ankara vis-à-vis de la Syrie.
Auparavant, la Turquie croyait pouvoir faire des groupes armés à Idlib un atout dans les négociations régionales. C’est la raison pour laquelle Ankara a accepté, lors des négociations d’Astana, de donner des garanties au nom des opposants armés syriens. Or, les choses ne sont pas allées de la manière que la Turquie avait prévu ; le groupe terroriste Front al-Nosra a anéanti, en trois semaines, toutes les milices soutenues par Ankara à Idlib, dont il a pris le contrôle total. C’est ainsi que la Turquie s’est vue brusquement privée d’une carte gagnante qu’elle voulait utiliser pendant les négociations. Les terroristes ont ensuite rejeté un médiateur appelé par la Turquie en disant qu’ils voulaient s’asseoir à la table des négociations directement avec le gouvernement et l’armée de la Syrie. La raison est claire : le Front al-Nosra a appris que la Turquie manquait de temps pour régler la crise d’Idlib avant l’échéance que lui avaient fixée la Syrie, l’Iran et la Russie et que l’heure était à une attaque militaire. Il a donc décidé de rompre avec la Turquie, car celle-ci n’était pas en mesure de le protéger face à l’armée syrienne et ses alliés.
D’autre part, les opérations militaires qu’avaient menées avec succès l’armée syrienne et la Résistance à Alep, à Deir ez-Zor, à Abou Kamal, dans le Sud, dans le Rif de Damas, à Homs, dans la Ghouta orientale et dans la région libanaise d’Ersal ont fait le Front al-Nosra se sentir impuissant face à l’armée syrienne et ses alliés. Du coup, non seulement le Front al-Nosra a tourné le dos à Recep Tayyip Erdogan, mais en plus il s’est dit prêt à négocier avec le gouvernement syrien en vue de trouver un accord de cessez-le-feu à condition que Damas permette aux milices opérant à Idlib de faire partie du processus politique en Syrie. Le gouvernement syrien n’a encore donné aucune réponse à cette demande du Front al-Nosra. Voici une deuxième victoire remarquable pour le gouvernement syrien : on craignait auparavant qu’Idlib ne reste longtemps sous la domination du Front al-Nosra en raison des trois millions d’habitants civils qui y vivent, mais les évolutions qui se sont récemment produites laissent présager une libération de la ville sans le moindre affrontement. »
Source: PressTV