Issu d’une famille de pêcheurs de perles, le Qatari Nasser Al-Khelaïfi incarne depuis 2011 un PSG haut de gamme et tourné vers l’international, mais cet ancien tennisman de 45 ans, discret pour ne pas dire secret, semble fragilisé par une accumulation d’affaires judiciaires et de déconvenues sportives.
Pointé du doigt après l’élimination piteuse du club parisien en 8e de finale de la Ligue des champions, son objectif prioritaire, le dirigeant qatari, également patron de la chaîne beIN Sports, fait face à un nouveau front judiciaire.
Il a en effet été mis en examen jeudi pour « corruption active », dans l’enquête sur des soupçons de corruption en marge des candidatures de Doha aux Mondiaux d’athlétisme de 2017 et 2019. Nasser Al-Khelaïfi, placé en mars dernier sous le statut de témoin assisté dans cette affaire, clame son innocence via son avocat.
Il s’était déjà retrouvé dans le collimateur de la justice suisse à l’automne 2017 quand les bureaux parisiens de sa chaîne beIN Sports avaient été perquisitionnés dans le cadre d’une enquête portant sur l’attribution de droits média de la Fifa pour les Coupes du monde de football.
Autant d’affaires qui commencent à écorner l’image de « NAK », très rare dans les médias, mais toujours souriant et affable en privé, dans d’impeccables costumes en Europe ou dishdashas au Moyen-Orient.
Relation privilégiée avec l’Emir
Lisse devant les caméras, l’homme est décrit comme inflexible en affaires. Seul point faible entendu dans l’entourage du PSG, dont il est le patron depuis le rachat du club par le fonds souverain QSI, il donnerait « trop de pouvoir à certains joueurs ».
Pour le reste, il sait trancher comme le montre le débarquement sans ménagement à l’été 2016 de son entraîneur Laurent Blanc, ou la mise à l’écart des joueurs « rebelles » Hatem Ben Arfa et Adrien Rabiot, ces deux dernières saisons.
Quand son club a été humilié en 2017 en Ligue des champions par Barcelone — la désormais fameuse « remontada » –, Al-Khelaïfi a fait exploser à l’été suivant les records en matière de transferts en lâchant plus de 400 millions d’euros pour s’offrir les stars Neymar et Kylian Mbappé.
Influent dans les instances, il est entré au comité exécutif de l’UEFA début février dernier. Mais l’ombre du fair-play financier, l’un des instruments de régulation de l’instance européenne, plane toujours sur le dépensier club parisien, malgré une récente décision favorable du tribunal arbitral du sport (TAS).
Si « NAK » entretient une relation privilégiée avec l’Emir du Qatar, nourrie par une passion commune pour le tennis et le football, la patience de ce dernier pourrait atteindre ses limites après une énième déconvenue en Coupe d’Europe, contre Manchester United en mars dernier.
Souvent en déplacement aux quatre coins du monde, il reste toutefois l’artisan majeur du développement international de la marque PSG, à défaut de son rayonnement sportif en Europe.
Le club de la capitale, qui a multiplié par cinq ses revenus depuis 2011 pour atteindre 540 millions d’euros lors de l’exercice 2017-2018, a par exemple ouvert deux bureaux à l’étranger, à Singapour et New York. Et a noué plusieurs partenariats « lifestyle », notamment dans le domaine de la mode, pour rendre son image encore plus glamour auprès du grand public.
Diplomatie sportive
Car le foot est un enjeu stratégique pour son pays, petit émirat gazier qui s’est servi de sa diplomatie sportive pour se faire une place sur la carte du monde, avec pour point d’orgue l’obtention controversée de l’organisation du Mondial-2022 de football.
Mais le Sunday Times a révélé début mars l’existence d’un contrat secret passé entre la Fifa et la chaîne de télévision Al-Jazeera, propriété de Doha, trois semaines avant le vote remporté en 2010 par le Qatar au détriment des Etats-Unis, de la Corée du Sud et du Japon, également candidats à l’organisation de cette Coupe du monde.
L’entrée de Nasser Al-Khelaïfi en février dernier au comité exécutif de l’UEFA a également nourri des accusations de conflit d’intérêt, alors qu’il est aussi le patron de la chaîne beIN Sports, l’un des principaux contributeurs économique de l’instance européenne.
« Sa nomination doit être rejetée parce qu’elle viole toute les règles de bonne gouvernance », avait ainsi plaidé, sans succès, le président de la Ligue espagnole Javier Tebas, qui accuse régulièrement le club parisien de ne pas respecter le fair-play financier de l’UEFA.
« Je sais qu’il y a des inquiétudes, mais je ne les partage pas. On a tous de temps en temps des situations de conflit d’intérêts. On signe un document qui dit que l’on s’exclut des discussions concernées », avait répondu le patron de l’UEFA Aleksander Ceferin.
Celui que tout le monde en France nomme simplement « Nasser » possède enfin des casquettes multiples. Outre ses fonctions dans le foot, il est aussi président-directeur général de BeIN Media group, qui a racheté les studios Miramax, et président de la Fédération asiatique de tennis.
Source: AFP