Pourquoi vouloir mettre l’Iran à la porte de la Syrie en l’accusant d’être en quête de se doter d’une base militaire à Lattaquié au nord de la Syrie, en faisant croire à une rivalité irano-russe en Syrie?
La réponse n’est peut-être pas à rechercher du côté des « velléités expansionnistes » que les États-Unis et Cie ne cessent d’attribuer à l’Iran mais plutôt dans cette route stratégique dont le premier tronçon vient d’être lancé sur le territoire irakien.
La route reliant l’Iran à l’Irak traversera le sud-ouest de Mossoul avant d’entrer en territoire syrien et transiter vers la Méditerranée. Les réserves gazières syriennes, réparties dans le nord et le sud du pays, sont estimés à 123 milliards de mètres cubes tandis que la quantité de ses gisements pétroliers sera équivalente à celle du Koweït. Cette route stratégique baptisée dans les milieux eurasiatique « route de la soie 2 » acquiert à la fois le soutien de la Chine et de la Russie mais aussi l’appui de l’Inde qui investit à Tchabahar, port stratégique du sud de l’Iran pour le relier aux quatre provinces afghanes que sont Herat, Kandahar, Kaboul et Mazâr-e Charîf .
En Irak, l’Iran a accès à cinq axes routiers principaux: Shalamcheh-Bassora, Shayb-Maysan, Mehran-Badra, Zarbatiyeh-Diayali mais aussi des axes traversant le Kurdistan irakien. Avec une si énorme capacité transfrontalière, l’Iran relie l’ouest asiatique à l’est du continent et rivalise avec la route «américaine » qui vise à connecter l’ouest de l’Irak (la fameuse al-Anbar) à la Jordanie puis à l’Arabie saoudite pour le grand bonheur d’Israël.
Or le corridor de la Résistance qui devrait donner accès depuis l’Iran à la Méditerrané et auquel participe, outre les trois pays directement concernés, l’Inde, la Chine et la Russie, est une voie de transit peu coûteuse qui met à profit un vaste réseau terrestre et maritime et relie les ports du sud iranien à la Méditerranée. Bref, il s’agit d’un projet eurasiatique dans le vrais sens du terme.
Samedi, la société israélienne Image Satellite a encore publié des images mettant en scène les travaux de constructions qui se déroulent entre la ville frontalière syrienne d’Abou Kamal et la ville frontalière irakienne d’al-Qaem. Cette frontière est contrôlée par les Hachd al-Chaabi (Unités de mobilisation populaire) du côté irakien et par l’armée syrienne et le Corps des gardiens de la Révolution islamique (CGRI) du côté syrien.
Cette carte montre un aperçu d’une route reliant Téhéran à la Méditerranée en passant par des villes frontalières irakienne et syrienne. ©Mashregh News/Illustration
Selon Al-Masdar News qui reprend les images et y ajoute un reportage, le corridor Iran-Méditerranée vient d’être parachevé sur son premier tronçon : le coup d’envoi d’une voie ferrée de 32 km entre Shalamcheh et Bassora, d’un pont de liaison au-dessus du fleuve Arvandroud (Chatt-el-Arab en arabe) vient d’être donné. Durant sa visite ce dimanche en Irak, le ministre iranien des Affaires étrangères Mohamad Javad Zarif a annoncé devant son homologue irakien le lancement de la voie ferrée entre les deux pays.
Pour Israël et les États-Unis, la capacité de l’Iran à gérer un si vaste réseau terrestre et maritime est un méga défi.
Dans un premier temps, l’ouverture de cette autoroute internationale, permettra à l’Iran et à la Syrie de contourner les sanctions que leur infligent les États-Unis. L’ouverture de cette autoroute revêt ainsi une importance capitale pour le gouvernement syrien, car les sanctions occidentales ont empêché les cargaisons de pétrole étrangères d’atteindre leurs villes portuaires. Mais ceci n’est qu’une simple facette du méga projet en cours qui devra à la fois impliquer la Chine, la Russie et l’Inde. D’où l’insistance de Washington et de Tel-Aviv pour que l’Iran soit éliminé de la scène syrienne.
Mais il est déjà beaucoup trop tard. Lors d’un forum économique et commercial irano-irakien tenu le 7 avril à Téhéran, les autorités iraniennes ont déclaré que l’Iran relierait le golfe Persique à l’Irak, à la Syrie et ensuite à la Méditerranée via des routes et des voies ferrées.
En janvier, le ministre syrien des Transports a déclaré que la liaison ferroviaire entre l’Irak et l’Iran était l’une des priorités de Damas et qu’elle s’inscrivait dans le cadre de la stratégie visant à renforcer les relations avec les voisins. Il a ajouté que ce réseau pourrait ensuite être lié aux réseaux ferroviaires de l’Asie Mineure, de la Chine et de la Russie.
Source: Press TV