« Je veux rentrer en Syrie. Il y a la guerre dans mon pays mais ça fait sept mois que nous vivons en Grèce comme des prisonniers » : Adan, d’Alep, a abandonné son rêve d’aller en Allemagne, comme des milliers d’autres Syriens piégés en Grèce.
Il vient d’arriver à la gare de Didymoticho, un village près de la frontière gréco-turque, avec sa femme, ses trois enfants et cinq proches, et s’apprête à passer un contrôle policier avant de tenter de passer en Turquie, le début d’un long voyage de retour.
« Nous sommes dans la rue depuis des mois, sans logement. A notre arrivée en Grèce, nous sommes allés au camp d’Idomeni où nous y sommes restés pendant trois mois » espérant franchir la frontière gréco-macédonienne pour aller en Allemagne, raconte Adan.
Il décrit son séjour lamentable dans ce camp improvisé où plus de 10.000 réfugiés étaient alors entassés dans des conditions misérables, avant que le gouvernement grec décide finalement de le démanteler en mai et transférer les réfugiés dans des centres d’accueil avoisinants.
Adan et sa famille ont ensuite tenté leur chance à Thessalonique, grande ville grecque proche d’Idomeni, avant de se retrouver à Athènes. « Nous avons réalisé qu’on est bloqués par la fermeture des frontières et avons finalement décidé de rentrer », ajoute-t-il.
Plus de 60.000 réfugiés sont actuellement piégés en Grèce, notamment après l’accord UE-Turquie du 18 mars visant à renvoyer systématiquement en Turquie les réfugiés qui en arrivent.
Les réfugiés et les migrants se trouvent ainsi dans l’impasse et leur aspiration à un nouveau départ dans un pays européen s’avère désormais quasi-impossible.
Car le programme de relocalisation ou de regroupement familial, seuls moyens légaux pour habiter et travailler en Europe, s’est avéré une procédure compliquée et lente en raison des réticences des nombreux pays qui ne veulent plus de réfugiés sur leur territoire.
L’UE s’était engagée ainsi en septembre 2015 à relocaliser en deux ans 66.400 réfugiés depuis la Grèce. Seulement 4.926 sont partis en treize mois.
Le dernier espoir pour les réfugiés, serait de demander l’asile en Grèce, une procédure également longue, et un choix difficile car le pays est toujours plongé dans la crise, le taux de chômage étant le plus élevé de la zone euro.
Traverser l’Evros de nuit
Adan montre aux policiers de Didymoticho ses papiers octroyés par les autorités grecques lors de leur enregistrement sur l’île de Lesbos -principale entrée en Grèce en provenance des côtes turques.
« Avec leurs papiers, ils ont droit de se déplacer librement dans le pays mais nous savons qu’ils sont venus pour trouver des passeurs qui les aideront à traverser de nuit le fleuve frontalier d’Evros pour passer en Turquie (…) », confie à l’AFP un garde-frontière ayant requis l’anonymat.
« Ce genre de cas arrive quotidiennement (…), c’est fou: ce sont des gens malheureux, ils ont déjà payé pour venir illégalement en Grèce et là il faut qu’ils repaient pour rentrer chez eux, ce ne sont que les passeurs qui en profitent », assène ce policier.
Le niveau du fleuve le long de la frontière gréco-turque est actuellement assez bas. « Certaines personnes utilisent des barques mais par endroits on peut même traverser à pied », souligne Chrysovalantis Gialamas, président des garde-frontières de la région d’Evros.
Des dizaines de réfugiés arrivent chaque jour à la gare de Didymoticho ces dernières semaines. Certains possèdent même des documents de réfugiés allemands, et seraient donc revenus d’Allemagne, déçus de ne pouvoir s’y intégrer.
« Nous ne pouvons pas vraiment vérifier s’ils sont faux ou vrais », remarque prudemment un policier.
Mais outre ceux qui veulent quitter la Grèce, le flux des migrants en sens inverse, c’est-à-dire de la Turquie vers la Grèce, a également repris ces derniers mois, et la police a été contrainte de renforcer sa présence à la frontière terrestre gréco-turque.
Depuis juillet, 70 passeurs et plus d’un millier de réfugiés ont été arrêtés, selon la police.
Jeudi, un passeur grec présumé, a été arrêté près de Thessalonique alors qu’il transférait 40 Syriens dont 15 mineurs dans son camion. Ils avaient payé 1.500 euros chacun pour aller à Thessalonique d’où ils espéraient trouver un moyen pour aller en Europe du nord, selon la police.
Source: AFP